Chelsea 2-0 PSG: Mourinho prend des risques en fin de partieApril 9, 2014
Les onze de départChelsea a décroché la victoire 2-0 requise pour passer au tour suivant à l'avantage des buts à l'extérieur.
Jose Mourinho enregistrait le retour de Samuel Eto’o en pointe, tout en étant dans le même temps privé de Nemanja Matic et Ramires dans l'axe du milieu de terrain. Eden Hazard démarrait à gauche mais sortait au quart de la partie, remplacé par Andre Schurrle.
Laurent Blanc, privé de Zlatan Ibrahimovic, plaçait Edinson Cavani en pointe et Lucas Moura à droite, ce qui laissait présager une puissance de contre-attaque conséquente .
La partie fut intense mais d'une qualité médiocre à ce niveau de la compétition et son principal intérêt sur le plan tactique fut de voir comment Chelsea développa son attaque en fin de partie.
La possession morose de ChelseaLe problème majeur de Chelsea pendant la première heure fut son incapacité à accélérer le rythme du match. Les joueurs démarrèrent la partie très lentement, apparemment surpris d'être pressés haut sur le terrain par le PSG et il leur fallut donc un certain temps avant de stabiliser la situation et de prendre le contrôle de la partie. Même quand ils parvinrent à asseoir leur domination en terme de possession de balles, le rythme des passes demeura extrêmement lent au milieu de terrain, le PSG en profitant pour se replier et former facilement un bloc défensif bas sur le terrain.
Lorsque Chelsea fut en position d'essayer de briser cette opposition, le second problème se révéla être la faiblesse des réelles menaces que l'équipe était en mesure de faire peser sur son adversaire. Certes, les quatre offensifs firent tous peser une menace mais ils ne bénéficièrent d'aucun espace. Dans ce genre de situation, vous devez pouvoir compter sur des joueurs venant de l'arrière pour "provoquer" l'opposition et l'attirer de sa position basse vers le ballon, créant ainsi des espaces pour les joueurs situés plus haut sur le terrain.
Cela ne se produisit jamais vraiment. Gary Cahill et John Terry sont des passeurs compétents mais pas des centraux capables de réellement créer du jeu. Les latéraux n'apportèrent pas non plus suffisamment le surnombre, en partie parce que Cesar Azpilicueta était sur le ‘mauvais’ flanc et parce que Branislav Ivanovic est un central baladé un peu partout sur le terrain depuis qu'il joue à Chelsea – ils furent ainsi rarement présents dans le tiers opposé du terrain, comme le montre le graphique ci-dessous. Lampard et Luiz sont techniquement des bons joueurs, mais aucun d'eux n'est à proprement parler un créateur. Le PSG put donc se concentrer sur la réduction des espaces laissés aux quatre offensifs – Cavani lui-même revenant parfois très bas puisqu'il n'avait pas besoin de presser les centraux.

L'ouverture du score par Chelsea se produisit très simplement sur une touche d'Ivanovic avec Schurrle à la conclusion. L'entrée en jeu forcée de Schurrle avait cependant déjà eu le mérite de dynamiser les locaux en récupérant la balle en position basse pour percuter en force la défense parisienne. Si Schurrle préfère habituellement jouer côté gauche, il n'en avait pas vraiment eu l'occasion cette saison du fait de la grande forme de Hazard. Ce fut d'ailleurs très surprenant de voir Mourinho échanger les positions de Schurrle et Wilian en seconde mi-temps – une décision qui ne sembla pas avoir grand effet sur le jeu d'attaque de Chelsea.
Les contres parisiensCependant le PSG ne se montra pas bien meilleur. Le pressing haut de début de partie laissa place à une défense plus basse et un jeu de contre-attaques. Les contres en eux-mêmes ne furent pas bien impressionnants, Lavezzi et Lucas ne parvenant pas à se créer plus qu'une paire de situations dangereuses. Le point positif de l'absence de montées des joueurs défensifs de Chelsea fut bien évidemment d'être facilement en position de se replier et de défendre contre ces contres.
Le plus étrange dans le jeu du PSG fut le manque d'allant des milieux de terrain lorsqu'ils bénéficiaient d'un peu d'espace et d'une défense londonienne sans protection. A certains moments en première mi-temps, il y eut des trous béants au milieu de terrain et l'opportunité pour Thiago Motta et Blaise Matuidi d'attaquer la défense ou de transmettre aux attaquants, mais ils préférèrent jouer vers l'arrière et se contenter de passes banales. Ils souhaitaient certainement ralentir le rythme du match, mais ils firent ainsi une croix sur de réelles opportunités d'attaque.
Les changements de MourinhoLe moment-clé de la partie intervint lorsque Mourinho fit entrer ses options offensives. Il accrut peu à peu la pression en faisant entrer deux attaquants pour deux milieux de terrain. A la 66ème minute, Demba Ba remplaça Frank Lampard, et Oscar monta d'un léger cran sur le terrain, même s'il s'agissait encore à ce moment-là d'un 4-1-3-2, avec David Luiz protégeant seul la défense. Chelsea allongea alors immédiatement ses passes vers Ba.
A la 81ème minute, le coach londonien alla encore plus loin en faisant entrer un troisième attaquant, Fernando Torres. à la place d'Oscar, Schurrle se plaçant derrière les trois attaquants et Torres prenant le flanc droit.
Il est évident qu'on ne peut augmenter le nombre de joueurs sur une partie du terrain sans les prélever en un autre endroit mais la stratégie de Mourinho était un risque calculé. Alors que, dans ce genre de situation, il avait pour habitude de passer à une défense à trois, il avait ici décidé de laisser son quatuor défensif sur le terrain, probablement par méfiance des contre-attaques parisiennes.
Les équipes lorsque Chelsea se mit en chasse d'un second but - Chelsea a 3 attaquants, le PSG un milieu de terrain axial supplémentaireLes occasions parisiennesLe milieu de terrain était désormais la zone faible de Chelsea et, en effet, Luiz fut complètement dépassé. Il se battit avec énergie, chargeant ses adversaires pour tenter de leur disputer la possession de balle, mais il était cependant clair que Matuidi et les remplaçants, Javier Pastore et Yohan Cabaye, trouvaient désormais des espaces devant la défense de Chelsea et ce fut dans la période qui suivit les changements offensifs de Mourinho que le PSG se créa ses deux meilleures occasions, à partir de cette zone du milieu de terrain.
Matuidi fit ainsi passer la balle par dessus la défense pour Cavani qui l'envoya dans les nuages depuis le côté gauche, puis Cavani eut une encore plus belle opportunité sur une bonne passe de Cabaye mais il échoua à profiter de ce qui fut la meilleure occasion de la partie.
Les plans B & C de ChelseaTel était donc le risque. Mais, clairement, Chelsea disposait désormais d'une puissance offensive supérieure. Comme toujours avec Mourinho, le plus impressionnant ne fut pas ses changements en eux-mêmes (n'importe-quel entraîneur peut lancer un attaquant ou deux en cours de partie) mais le fait qu'aucune place n'avait été laissée au hasard en termes d'organisation.
Comme il l'avoua après le match, Mourinho avait travaillé ces différentes alternatives tactiques lors des entraînements – la version avec deux attaquants et celle avec trois. Ce fut évident dans la façon dont Chelsea conserva son équilibre en dépit de la présence de trois attaquants sur le terrain, les trois ne se battant par sur les mêmes ballons.
“Nous nous sommes entraînés hier avec les trois systèmes différents que nous avons utilisés: celui avec lequel nous avons débuté, celui sans Lampard et finalement celui avec Demba et Fernando sur le terrain, et les joueurs savaient donc quoi faire.” La clé du match ne fut donc pas les changements mais la préparation faite pour les anticiper.
Lorsque Ba marqua le but vainqueur, Mourinho sprinta le long de la ligne de touche apparemment pour le fêter, mais il déclara après coup que l'objectif premier de sa course était de donner à Torres et Ba des instructions sur leur positionnement pour les sic dernières minutes du match, ce que les images semblent confirmer. Le travail de Ba fut de se poster devant la défense et de marquer Alex si celui-ci passait aux avant-postes, alors que Torres prenait Maxwell en individuel.
PSGIl faut également dire un mot du PSG qui se replia dans une défense très basse pour les dix dernières minutes du match, faisant entrer un central supplémentaire, Marquinhos, pour jouer juste devant les quatre autres défenseurs. Dans le même temps, Lavezzi et Lucas avaient été sortis.
Blanc sera critiqué pour s'être montré trop défensif et en réaction, mais dans cette situation sa stratégie n'était pas mauvaise en elle-même; elle fut simplement pauvrement exécutée aux deux extrémités du terrain. Cavani ratait ainsi la plus belle occasion du match tandis que la défense parisienne se montrait étonnamment fébrile de jouer aussi bas, probablement par un manque complet d'habitude de jouer de cette façon en Ligue 1. Ils échouèrent donc totalement à gérer la pression de Chelsea.
ConclusionN'importe-qui peut effectuer des changements offensifs en faisant entrer deux attaquants mais le "génie" de Mourinho ne fut pas ces changements en eux-mêmes mais bien le fait que son camp avait été préparé auxdits changements et que les joueurs avaient clairement compris leurs nouveaux rôles sur le terrain.
Les entraîneurs sont souvent critiqués pour ne pas avoir de Plan B, mais il est tout aussi impardonnable de mettre en œuvre un Plan B à mi-parcours d'un match avec des attaquants empilés les uns sur les autres, se battant pour les mêmes ballons. Ce Plan B-là était sous contrôle, anticipé, de même que le plan C.
C'est son niveau de préparation, son attention aux détails et sa communication qui font de Mourinho un tacticien talentueux, plus encore que ses décisions tactiques elles-mêmes.