Citation (sukercop @ 31/03/2010 à 10:21)

Je pense que oui. Et je suis intimement convaincu que le facteur culturel entre en ligne de compte.
Sauf que la culture n'est pas la race. Une nouvelle fois, c'est une belle confusion... La "culture propulaire", par exemple, n'a rien à voir avec des catégories ethno-raciales.
Dans le cadre d'un travail sur la prise en charge judiciaire des mineurs délinquants, j'ai été assistant d'un juge pour enfants dans le Nord de la France. Peu de noirs et peu d'arabes. Des Kevin, des Christopher, des Brian et des Jordan. Parce que les pauvres du Nord sont moins noirs et moins arabes...
Alors il est clair que le problème est complexe, et en soi, la question du comptage ethnique mérite d'être posée. Le problème est ensuite double. D'une part, la manière de "compter" n'est jamais neutre, et oriente le regard que l'on porte sur les problèmes. D'autre part, la tâche de définir des catégories raciales est très complexe. J'anticipe l'argument nord-américain, et notamment étasunien. Non seulement leurs méthodes de comptage sont très contestables. Mais de plus, la situation y est totalement différente. Les banlieues françaises n'ont jamais été des "ghettos" : la mixité y est beaucoup plus importante, et les frontières entre catégories ethno-raciales beaucoup plus floues. Les quartiers les plus "communautaires" en France sont les quartiers asiatiques (le 13e à Paris ; Lognes dans le 77), et même les concernant, jamais plus de 50% d'un quartier n'est composé de la même "origine ethnique". Résultat d'un modèle d'intégration qui refuse de considérer les différences culturelles (à la différence du multi-culturalisme nord-américain). Sans compter que la "couleur de peau" est un vaste "fourre-tout". Les plus beaux travaux historiques sur l'esclavage montraient déjà comment les "maîtres" distinguaient entre les différentes teintes de noir.
Mais on peut toujours tenter de compter (et on le fait), et cela donne souvent des résultats intéressants. En particulier, on peut utiliser la nationalité des parents. Cela exclue de l'échantillon les immigrés de troisième génération, mais cela peut se faire. Et cela a été fait dans le cadre de réflexions sur l'échec scolaire, à l'aide d'un modèle de régression statistique (qu'on appelle modèle "logit") qui permet de contrôler les variables et de réfléchir "toutes choses étant égales par ailleurs". Le résultat de ce statisticien (qui n'a rien d'un gauchiste...) est passionnant : a. Globalement (en ne contrôlant aucune variable) les fils d'étrangers réussissent moins bien à l'école que les fils de français ; b. Si l'on contrôle la variable "origine sociale", on se rend compte qu'à origine sociale égale (donc deux ouvriers, admettons), les fils d'étrangers réussissent en moyenne mieux à l'école que les fils de français. Pour ceux que cela intéresse, l'étude est signée Louis-André Vallet, membre du Centre de recherche en Economie et Statistique. Vous trouverez des choses sur Internet sans problème.