Arno PE toujours au top de la vacuité
Citation
2013-05-28
dernière réaction
28/05/2013 à 18h09
auteur
Arno P-E
Ancien chroniqueur sur PSGMAG.NET, et supporter du Paris Saint-Germain. Étonnant, non?
In Bed With le PSG : N.
Lui aussi est champion de France 2013, mais il n'a même pas eu droit à un coup de fil. Il raconte sa nuit du titre depuis sa chambre à Doha.
Il est temps d'essayer de dormir maintenant. Avec le décalage horaire entre le Qatar et la France, il faudrait que j'éteigne leur télévision, et que je remonte la couette. Pour commencer. Déjà que j'ai du mal à trouver le sommeil depuis que je vis dans cet hôtel... Ce soir, ça va être dur, c'est clair. Jouer dans un championnat auquel on ne croit pas ne donne aucune envie de se maintenir à niveau, alors si j'arrive fatigué à l'entraînement, c'est pas très grave. Et puis là, j'ai regardé les reportages sur Paris au Canal Football Club...
Moi, dimanche dernier, je sais que je suis devenu champion de Ligue 1. J'ai joué cette saison pour le PSG, j'ai marqué contre Rennes, donné des passes décisives, j'ai participé à ce titre... De voir tous les autres à Lyon, ça m'a fait très mal. J'aurais aimé porter ce tee-shirt moi aussi, j'aurais aimé faire la fête dans le vestiaire. Je me suis senti très loin ce soir-là, à Doha. Comme si je n'avais rien gagné. Je mérite d'être Parisien et champion. Plus que d'autres. Plus que ceux qui sont venus depuis six mois à peine, à se la jouer star, à être seuls à leur poste, mais à être blessés tout le temps. Ils sont juste venus me prendre ma place en fait, et ils courent dans les vestiaires avec ce tee-shirt sur le dos! Pourquoi lui?
Il était où quand le PSG n'avait pas de moyens? C'est facile de dire que l'on ne vient à Paris que s'il y a un beau projet. Tu es au Brésil, avec ta famille, tu laisses les autres se qualifier en Ligue des champions avec des coéquipiers de merde, et après tu débarques une fois que le boulot difficile il est déjà fait, que le groupe il est fort, et tu as le tee-shirt du titre? Quand je pense qu'on m'a reproché de pas être bon pour l'entente du vestiaire, de pas faire la passe à Gameiro, de ne penser qu'à moi... Mais le meilleur buteur de la saison, avant Ibra, c'était qui au PSG? L'autre il a fait quoi?
J'ai eu beaucoup de rage en moi dimanche dernier. Cette semaine, j'ai essayé de passer à autre chose, de me changer les idées. Mais ici, qu'est-ce qu'il y a d'intéressant à faire? Il n'y a rien. Personne. Personne pour parler de toi. Il fait tellement chaud en plus. Je déteste leurs climatisations, partout. Impossible de faire régler correctement celle de la suite, dans cet hôtel pas un employé qui parle brésilien ou français. Comment veux-tu dormir? Ce soir, j'ai zappé. Je me suis fait monter un dîner, n'importe quoi, juste pour pouvoir boire un peu de l'alcool que je cache dans ma chambre. Et qu'on ne me voit pas seul au restaurant. J'avais prévu de me coucher tôt, parce que je savais qu'il y avait le CFC et je me disais que je ne voulais pas le voir. Puis j'ai zappé, sur la télévision brésilienne, mais c'est le matin là-bas, alors j'ai regardé un ou deux feuilletons, puis je suis passé sur les chaînes de la France et bien sûr, à la fin j'ai regardé le football club.
Le match contre Brest, franchement, ça ne m'a rien fait. Avec la fatigue de la nuit, c'est comme si c'était une autre équipe, dans une autre époque. Ces images-là, je les avais déjà vues dimanche dernier à Lyon finalement, mais en direct, en plus fort. Les cheveux peints, les feux d'artifice, ça ne rajoute rien à la peine... Je ne fais plus partie de ce club, je l'avais compris. Beckham, je le connais pas, alors ses larmes, les chants du stade... J'avais l'impression de voir un téléfilm de plus dans ma soirée. Non, ce n'est pas pour ça que j'ai attendu.
Là, ça tourbillonne un peu dans ma tête, je suis assis dans mon lit et la télé continue à clignoter. J'ai les yeux fatigués. Il faudrait vraiment que je l'empêche. Je n'aime pas me réveiller et qu'elle soit encore allumée au matin. C'est juste que j'ai du mal à réaliser. Le reportage sur Hoarau. Lui aussi il est parti. Je l'ai vu faire l'idiot pendant le match de son équipe chinoise. Lui aussi il joue au milieu de guignols, et il sait pourquoi il est là-bas... Lui aussi en fait il ne marque pas tant de buts que ça, et il se rend bien compte que même là-bas il n'est pas vraiment le sauveur. Lui aussi a vécu le titre dans une chambre d'hôtel, avec un cousin dont il a fallu qu'il paye le voyage, la bouffe, et qui a quand même voulu repartir vite. Lui aussi il a marqué pour le PSG cette saison. Et les précédentes. Lui aussi il s'est dit qu'il n'était plus Parisien. Je l'ai vu. Ils ont fait ce reportage sur lui, mais ils auraient pu le faire sur moi. C'était pareil. Ces images, elles parlaient de moi aussi. Comme lorsque j'étais leur invité. Comme lorsque je venais sur leur plateau. Les yeux fatigués d'être loin, en Chine ou au Qatar, c'était les miens aussi! J'y suis allé sur le plateau du CFC. J'y étais.
Jusqu'à ce coup de fil à Douchez... J'avais manqué la dédicace du gardien et des autres à Hoarau dimanche dernier. Je ne savais pas qu'ils avaient pensé à lui à la fin du match, devant tout le monde. Et qu'ils s'étaient parlés ensuite. Mais Hoarau ne fait plus partie de ce club lui non plus! Il est parti pour l'argent! Pourquoi je n'ai pas eu le droit de les appeler moi? J'aurais pu le faire devant tout le monde.
Je crois bien qu'ils n'ont jamais prononcé mon nom ce soir de l'émission. Pas une fois de la soirée. Il me reste un peu de vin, la bouteille est sur la table, il faudrait que je me lève. Et que je retrouve la télécommande. J'ai la tête qui tourne. Je ne me sens pas très bien. Mais depuis la dernière fois quand j'appelle la réception la nuit personne ne vient. Toute cette semaine, j'ai cru que je n'étais plus Parisien. Il est vraiment tard maintenant. Je ne suis pas très sûr. Je me demande si je l'ai jamais été.