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Da Costa, ce Français star au pays du hockey
Petit, Stéphane Da Costa rêvait d’enfiler la tenue de hockeyeur professionnel. C’est à Ottawa (Canada), au sein du meilleur championnat au monde, que ce Seine-et-Marnais de 21 ans a signé le 31 mars. Un exploit que seuls deux Français avaient réalisé avant lui...
De la fenêtre de sa chambre, un petit garçon de Dammarie-les-Lys à côté de Melun (Seine-et-Marne) aperçoit la patinoire municipale nichée au milieu des tours du quartier de la Plaine-du-Lys. Il a 6 ans à peine. «Quand on est petit, on veut faire comme ses grands frères. Au lieu d’aller au foot, ils ont joué au hockey sur glace. J’ai suivi et ça m’a plu tout de suite.»
Quinze ans plus tard, le bambin est devenu un homme. Il s’appelle Stéphane da Costa. Il a 21 ans et après 4 ans passés à ravager les statistiques du championnat universitaire américain, il vient d’être recruté par les Senators d’Ottawa pour intégrer la NHL. La National Hockey League est au hockey sur glace ce que la NBA est au basket: le plus grand championnat du monde avec les meilleurs joueurs de la planète. Il est seulement le troisième joueur français de l’histoire après Philippe Bozon (1992-95) et Cristobal Huet (2003-2010) à intégrer ce cercle très fermé.
«Stéphane, raconte sa mère Yolande avec émotion, va toujours au bout de ce qu’il entreprend. C’est un grand perfectionniste. Une de ses premières activités à été le jeu d’échecs. A 4 ans, il était champion d’Ile-de-France. Après il a voulu faire du tennis. Il a toujours voulu être un pro du hockey. Il y est arrivé. Cà ne m'étonne presque pas.»
Le destin de Stéphane Da Costa est extraordinaire. Né d’un père handballeur franco-portugais et d’une mère franco-polonaise nageuse de bon niveau, il a traversé l’Atlantique à 17 ans avec un simple baluchon sur l’épaule sans connaître un traître mot d’anglais. «Je savais juste dire «Hello!», «Thank you» et surtout «I don’t understand» (Ndlr : je ne comprends pas) qui était mon expression favorite. Je suis parti à l’aventure avec un rêve : devenir joueur de hockey professionnel.»
D’abord au Texas pendant deux ans puis au Merrimack College, une petite faculté proche de Boston, il a touché du doigt le rêve américain; partir de rien et arriver au sommet. «A Merrimack, glisse doucement sa maman, une grande photo de lui est fixée à l’entrée, preuve qu’il a marqué les esprits. Je me souviens qu’il n’aimait pas ça, être mis tout seul en valeur, car pour lui, le hockey est d’abord un sport collectif.»
«Même si on a l’impression que tout est allé vite, précise l’international tricolore, j’ai beaucoup galéré, fait beaucoup de sacrifices avec mes parents qui ont eu le courage de me laisser partir seul à l’autre bout du monde. Trois mois après mon départ, j’ai eu le bourdon et j’ai voulu rentrer mais ils m’ont dit de m’accrocher. Ils avaient raison.»
Convoité par toutes les franchises de la NHL, épatées par les statistiques du «Frenchy» (14 buts, 31 assists en 33 matches sur la dernière saison NCAA), il a choisi lui-même sa destination. «J’ai eu une quinzaine de manageurs généraux au téléphone, raconte le Seine-et-Marnais. Tous voulaient me faire signer, mais j’ai choisi les Senators d’Ottawa. Cela m’a paru le meilleur choix.»
Un contrat de deux ans et 630 000 dollars en poche
Éliminée des play-off 2011, la franchise de la province francophone de l’Ontario au Canada est en pleine reconstruction. Stéphane Da Costa a disputé avec elle les quatre derniers matches de la saison sous les yeux de ses parents Thierry et Yolande, gardiens d’un collège à Perthes-en-Gâtinais près de Melun, fiers à en pleurer. «J’ai joué mon premier match contre Toronto devant 22 000 personnes. En guise de bizutage, mes partenaires m’ont laissé seul à la base devant la foule entière. J’en ai eu des picotements dans tout le corps.»
Ce même soir, à des milliers de kilomètres de là, son grand frère Teddy joue avec Rouen la finale de la Ligue Magnus qu’il remporte en étant désigné meilleur joueur de la finale. Lui aussi a failli partir aux Etats-Unis dans le Colorado. Mais trop bon élève, il a poursuivi ses études en France. «C’est un truc de fou, raconte Stéphane. Le jour où je signe en NHL, mon frère est sacré champion de France. Comment aurions-nous pu imaginer ça lorsque, gamins, nous nous amusions ensemble sur la patinoire de notre enfance?»
Depuis le début de la semaine, les deux frangins - l’aîné Gabriel joue aussi en Ligue Magnus à Dijon - sont sous le maillot de l’équipe de France qui prépare le Mondial en Slovaquie. Dimanche à Bercy, ils défieront ensemble le Canada, champion olympique. «C'est comme affronter le Brésil au foot», raconte l’enfant de Dammarie. «On ne s’en rend pas compte en France, regrette presque Da Costa, mais le hockey là-bas, c’est le sport national. Nous y sommes aussi célèbres et adulés que les footballeurs en France. J’ai joué 4 matches et à Ottawa, on me reconnaît déjà dans la rue. Mais ça va. L'argent - il a signé un contrat de deux ans pour 630 000 dollars - et la gloire qui vont avec la NHL, je n’y pense pas. Je n’ai pas l’intention de changer.»
Une fois le Mondial passé avec l’ambition de maintenir la France dans le groupe A, Stéphane Da Costa retraversera l’Atlantique pour préparer la prochaine saison qui commencera en septembre dans un univers où personne ne fait de cadeaux à quiconque. «J’ai deux premières années pour faire mes preuves et garder ma place. En attendant, je vis un rêve éveillé.»