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« Pas sûr que la collaborationavec l’UCI dure longtemps »
Alors que le Tour de France se félicite de n’avoir eu aucun cas de dopage en 2009, l’AFLD et son président, Pierre Bordry, attendent de voir.
Le président de l’AFLD jette un petit pavé dans la mare de jouvence du Tour de France 2009. Pour le président de l’Agence française de lutte contre le dopage, sa collaboration avec l’UCI ne l’a pas vraiment satisfait et les soupçons demeurent.
Il n’y a pas eu une seule affaire de dopage liée à ce Tour de France 2009. Est-ce à dire que tout va bien ?
Pierre Bordry. Tant que nous n’aurons pas terminé toutes les analyses, on ne peut pas dire que tout va bien. De toute manière, je n’en ai pas la certitude et je n’en suis même pas convaincu. Nous avons la possibilité de faire des analyses a posteriori car nous pensons qu’il y a des molécules pas forcément nouvelles mais nouvellement utilisées. Les tests permettant de les découvrir sont toujours en cours de validation. Nous avons des suspicions, notamment sur une molécule particulière dont je ne connais pas le nom, je ne suis pas médecin, mais qui a de fortes chances d’avoir été utilisée.
Donc, il faut encore attendre et voir ?
Pierre Bordry. Il ne faut pas se réjouir trop vite. Les choses ne sont pas aussi claires qu’il y paraît. Plus les contrôles sont rigoureux et plus les procédures de dopage sont sophistiquées. Donc, il faut prendre le temps. D’ailleurs, compte tenu des informations que nous avons eues au cours de l’année (l’AFLD a notamment auditionné Bernhard Kohl, troisième en 2008, déclaré positif à l’EPO CERA puis déclassé), nous allons reprendre les analyses de certains coureurs du Tour de France 2008 (Pierre Bordry a fait remettre à Monaco une lettre officielle aux coureurs concernés par ces analyses. Ils seraient une quinzaine dans le viseur, tous concentrés dans les vingt premiers du classement du Tour 2008 - NDLR). J’en ai le droit puisque l’épreuve était sous notre contrôle cette année-là. Nous avons d’ailleurs huit ans pour le faire.
En fait, il n’y aura eu qu’un seul incident notable sur ce Tour 2009. Celui du contrôle laxiste des hommes de l’Union cycliste internationale révélé par vos contrôleurs…
Pierre Bordry. C’est le seul incident qui a été révélé par la presse. Mais celui-ci n’a été que le révélateur d’une situation qui n’allait pas dans les premiers jours. Je n’en dirai pas plus. Je vais faire un rapport complet à l’UCI dès aujourd’hui. Tout de même, à la suite de mon intervention, Pat McQuaid a pris les mesures qui s’imposaient. S’il ne les avait pas prises, le contrat qui nous liait à l’UCI aurait été caduc.
Êtes-vous satisfait malgré tout de votre collaboration avec l’UCI ?
Pierre Bordry. Satisfait, oui. Et en même temps insatisfait. Cette année, nous n’étions pas les maîtres du jeu. Nous n’avions pas la charge des analyses sanguines, ni des prélèvements sanguins, et dans la mesure où nous n’avions pas accès aux résultats précis, techniques, des profils sanguins des coureurs, cela compliquait la tâche du ciblage. La loi française, dite loi Lamour, n’impose pas à l’UCI de nous communiquer les passeports biologiques. Toute la maîtrise de la lutte antidopage incombe aux fédérations internationales. L’an dernier, lorsque le Tour était sous notre égide à la suite du conflit ASO-UCI, nous avions pu effectuer un test sanguin avant le départ du Tour de France. Les résultats nous étaient parvenus en quarante-huit heures, ce qui nous avait été très utile pour le ciblage.
Cette collaboration sera-t-elle renouvelée ?
Pierre Bordry. Nous collaborons avec l’UCI sur les autres courses qui se déroulent sur notre territoire. Mais je ne suis pas sûr que celle-ci dure longtemps.
Comment cela ?
Pierre Bordry. Nos objectifs en tant qu’agence nationale ne sont pas les mêmes que ceux d’une fédération internationale. Nous, nous sommes très attachés au ciblage et nous voulons en avoir les moyens. Nous sommes aussi très attachés aux contrôles inopinés et ce n’est pas toujours facile à défendre. Je ne parle pas forcément du Tour de France. La loi Buffet nous permettait d’agir sur le territoire national. la loi Lamour laisse un blanc-seing aux fédérations internationales. Le constat est là !
On vient d’apprendre que Danilo Di Luca a été contrôlé positif à la CERA. Que vous inspire ce nouveau cas ?
Pierre Bordry. Je suis un peu étonné de voir que le cas Danilo Di Luca survienne si tard après la fin du Giro. Mais tout cela dépend de la politique de l’UCI et de la manière dont elle fait ses analyses. Posez-lui donc la question. J’ai le sentiment qu’à l’avenir, il faudra attendre quelque temps après une compétition pour avoir des cas positifs.
Devra-t-on attendre aussi longtemps si un cas positif est révélé sur le Tour de France 2009 ?
Pierre Bordry. C’est l’UCI qui garde les tests. C’est elle qui donnera les résultats. Donc, quand ? Je ne sais pas. Je n’ai aucune information de l’UCI sur l’état de ces résultats. De plus, toutes les analyses sanguines ont été faites en dehors du laboratoire de Châtenay-Malabry. Nous n’avions que les tests urinaires.
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A la différence du Tour 2008, l'édition 2009 s'est achevée sans la révélation du moindre cas positif. Faut-il en conclure pour autant que cette 96e Grande Boucle s'est courue à l'eau claire ?
Ce n'est pas ce que croit Pierre Bordry, le président de l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD): "Il y a vraisemblablement eu des transfusions sanguines", a-t-il déclaré au Monde. Le président de l'AFLD a également "la conviction que deux nouveaux produits ont été utilisés pendant le Tour, deux médicaments qui ne sont pas encore sur le marché". Selon nos informations, l'une de ces deux substances serait l'hematide, une EPO de troisième génération qui permet de maintenir le niveau d'hémoglobine.
Encore en phase clinique, ce médicament, dont la commercialisation n'est prévue que pour 2011, figure déjà sur la liste des substances interdites de l'Agence mondiale antidopage (AMA). Le second médicament serait l'Aicar, un produit qui agit sur les tissus musculaires et permet de brûler les graisses. "J'ai été saisi par la maigreur de certains coureurs", note Pierre Bordry. Les tests de détection de ces deux produits pourraient être prêts d'ici septembre-octobre. Autant dire, qu'à l'instar de l'EPO CERA l'an dernier, des cas positifs pourraient être déclarés plusieurs semaines après la fin du Tour.
D'autant que l'AFLD s'apprête également à tester de nouveau des échantillons prélevés lors du Tour 2008 sur une quinzaine de coureurs venant de disputer la Grande Boucle et dont certains ont connu des performances bien inférieures à celles de l'an dernier. Enfin, l'AFLD a fait des découvertes dans les poubelles de certaines équipes. "Nous avons trouvé des médicaments lourds, comme une substance pour produire de l'insuline qui est normalement utilisée par des diabétiques", indique Pierre Bordry.
Lemonde
Autant dire que vers le mois d'octobre, certains risquent d'être pris dans les mailles du filet. Mais bon, il m'étonnerait fort que des gros poissons soient chopés.
Mais bon, vu que certains de 2008 sont sur la corde raide, je sens bien Menchov qui est passé totalement à travers de son Tour.