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Au PSG, les voyages ne forgent pas toujours la jeunesse
Avec dix joueurs formés au club au sein de son effectif, le PSG fait la part belle aux locaux. Seulement, mis à part Rabiot, Areola voire Kimpembe, les autres ne jouent pas ou peu. Et les expériences de chacun prouvent bien qu'il n'existe pas un parcours unique pour s'imposer dans le club de la capitale.
Une année à Lens pour apprendre, une autre à Bastia pour se révéler puis une troisième à Villarreal pour confirmer. Le parcours d'Alphonse Areola (23 ans) est un modèle du genre. Formé à Paris, le gardien, sous contrat professionnel avec le club de la capitale depuis 2009 (il avait alors 16 ans et demi), a choisi l'exil pour se frotter aux joutes du haut niveau. Une stratégie payante puisque, de retour au bercail depuis l'été dernier, il a progressivement poussé Kevin Trapp, le titulaire habituel, sur le banc. «Alphonse a toujours eu cet objectif de s'imposer dans son club formateur», décrit son agent Franck Belhassen. Un objectif rendu possible par ce parcours, planifié en amont, et suivi à la lettre. «Vous pouvez le dire qu'il a parfaitement été géré», rigole Belhassen, avant d'entrer dans le détail : «Ce plan de carrière, on l'a bâti à trois, Alphonse, moi et les dirigeants. On a toujours travaillé de concert avec eux. Dès le début, on savait comment cela allait se dérouler : un prêt en Ligue 2, un autre en Ligue 1, puis un troisième à l'étranger, si possible dans un club européen. Quand on a du potentiel, il faut l'exploiter, pour l'exploiter, il faut jouer, et pour jouer, si on n'a pas les moyens de le faire dans son club formateur, il faut être capable de s'exiler pendant un certains temps».
Edouard a choisi l'exil
Comme Areola, ils sont nombreux les jeunes formés au club à vouloir s'imposer au PSG. Cette année, ils sont neuf - en plus du gardien - à composer l'effectif d'Unai Emery (Descamp, Kimpembe, Georgen, Nkunku, Rabiot, Ikoné, Callegari, Augustin, Ongenda). Echaudés par les épisodes Kinglsey Coman et Moussa Dembele, partis gratuitement avec la réussite que l'on connaît, et bien obligés de sécuriser leurs prospects les plus talentueux au risque de les voir filer eux aussi, les dirigeants parisiens ont fait signer en masse les jeunes révélés dans le même temps et par la suite. Problème, parmi les joueurs précédemment cités, seul Adrien Rabiot et Presnel Kimpembe ont fait leur trou. Jonathan Ikoné et Jean-Kevin Augustin ont réussi à gratter quelques minutes de jeu mais doivent plus souvent se contenter de la CFA, comme le reste de leurs camarades issus du centre de formation.
Au contraire d'un Odsonne Edouard, lui aussi néo-pro (18 ans), qui a filé pour la saison à Toulouse. Un choix judicieux puisque sous les ordres de Pascal Dupraz, il a déjà pris part à dix rencontres, dont quatre comme titulaire. «Ce que fait le petit Edouard, je trouve ça intéressant, valide Franck Belhassen. Quand on est jeune, on a des fourmis dans les jambes, c'est important de jouer. Et ce n'est pas parce qu'on atteint un objectif en signant un contrat pro à 18 ans qu'il faut s'arrêter. Pour progresser, il faut aller faire ses gammes ailleurs et revenir plus fort dans son club formateur». Il est vrai qu'en restant à Paris, Alphonse Areola aurait eu moins de chances de s'y imposer.
L'avis tranché de Franck Belhassen interroge Laurent Bonadéi, actuel entraîneur de la réserve de l'OGC Nice et entraîneur des U19 parisiens entre 2013 et 2015 : «Est-ce qu'il vaut mieux s'entraîner quotidiennement avec des grands joueurs comme Cavani ou Thiago Silva et faire cinq matches par an avec eux et le reste en CFA ou faire vingt matches dans un autre club et s'entraîner avec un effectif moins talentueux que celui du PSG ? C'est un éternel débat. Il n'y a pas de vérité à ce sujet, de chemin bien particulier pour arriver un jour au très haut niveau». Et les récentes expériences vécues par des jeunes du club parisien ne permettent pas de répondre à la question.
Les échecs Ongenda et Bahebeck
Youssouf Sabaly, prêté pour la quatrième année consécutive, à Bordeaux, a déjà joué plus de 100 matches parmi l'élite et caresse toujours l'espoir de revenir dans son club formateur avec une grosse expérience du haut niveau. Adrien Rabiot a lui aussi dû s'exiler six mois à Toulouse en 2013 pour accélérer sa progression en jouant (13 matches). «Avec le recul, ce prêt était vraiment la bonne décision. Là-bas, j'ai beaucoup joué et donc progressé. Et puis cette expérience m'a permis de voir comment ça se passait ailleurs. A Paris, on est habitué à un certain confort», confirmait le néo-international dans La Dépêche du midi voici quelques mois. «C'est vrai que c'est bien pour eux de sortir du contexte parisien. Ils vivent des situations différentes et grandissent dans la vie quotidienne», affirme Bonadéi, avant d'émettre un bémol : «Il faut pouvoir être autonome. Car quand on a 17 ou 18 ans et qu'on est prêté à 800 kilomètres du domicile familiale, on n'a peut-être pas toute les armes pour organiser sa vie de tous les jours».
L'éloignement, c'est peut-être ce qui a pesé dans les prêts mitigés, voire ratés, de Bahebeck (Troyes, Valenciennes, Saint-Etienne) et d'Ongenda (Bastia). Pourtant présentés comme deux grands talents du PSG, ces deux-là sont aujourd'hui à l'arrêt, à Pescara pour le premier (encore en prêt) et avec la CFA parisienne pour le second. Des expériences dont se sert en exemple José-Karl Pierre-Fanfan, l'agent de Christopher Nkunku (19 ans), qui a préféré rester à Paris cet été plutôt que de partir s'aguerrir ailleurs. «Etre prêté, pourquoi pas, mais il faut voir dans quelles conditions», prévient Pierre-Fanfan. L'agent et son poulain ont préféré prôner la stabilité pour différentes raisons : la jeunesse et aussi le projet de jeu dans lequel il allait se retrouver, forcément différent de celui du PSG. «Dans le cas de Christopher, vu son profil, il faut une équipe avec une certaine maîtrise dans le jeu, relance Pierre-Fanfan. Et en Ligue 1, ce n'est pas le cas de toutes. Il a 19 ans et évolue dans un contexte favorable avec des échéances intéressantes, notamment en Youth League. Pour l'instant, on a jugé qu'un prêt n'était pas nécessaire et qu'il était important de rester pour continuer à progresser».
Rester, c'est aussi la stratégie choisie par Presnel Kimpembe. Le défenseur central a rongé son frein et surtout beaucoup appris aux côtés de défenseurs centraux aguerris. «David Luiz m'a pris sous son aile. Il m'a aidé à être ce que je suis aujourd'hui. L'an dernier, il me faisait bosser mon pied faible et il m'aidait à me positionner au moment du geste. Thiago Silva, il m'aide énormément tactiquement, à travers des vidéos», affirmait-il récemment dans L'Equipe. Et après dix matches en deux saisons, il a profité du départ de David Luiz cet été pour grimper dans la hiérarchie derrière Thiago Silva et Marquinhos. Entre août et octobre, il a enchaîné huit titularisations (avant d'être suspendu par son club pour avoir refusé une prolongation de contrat). Un parcours qui prouve bien que pour les titis parisiens, le bonheur n'est pas toujours dans le prêt. En revanche, pour Areola et les autres, il l'est dès lors qu'ils sont sur le pré.
Antoine Raguin
France FootballJe suis partagé pour Nkunku. Pour avoir bien observé ses derniers matches, en Youth League ou en CFA, il a du mal à prendre le jeu à son compte en CFA, chose qu'il parvient à faire la plupart du temps en Youth League (si il le fait par intermittence dans le jeu, il est très décisif en termes de stats buts/passe décisives).
Nantes, Lorient, FC Mantois (de tête), autant de matches où il a eu des occasions franches sans parvenir à les concrétiser et surtout où il a eu du mal à peser (il l'a fait en première face à Nantes). Alors à quoi attribuer cela ? Personnellement, le match d'hier m'a vraiment fait penser que la réserve manque de leader sur le terrain, notamment au milieu (Epaillard, Callegari, Nkunku, je n'ai vu aucun des trois beaucoup parler et tenter de secouer les siens) et Nkunku devrait pouvoir s'affirmer davantage. Est-ce qu'il le fera cette saison en CFA alors qu'il semble clairement installé dans un certain confort ou est-ce que cela pourrait passer par un prêt pour justement voir ce qu'il se fait ailleurs (pour reprendre les propos de Rabiot), je n'ai pas d'avis tranché.