Citation (macbath @ 18/10/2010 à 18:44)

Après sur le fond de la réforme, on entend quand même quelques voix dans l'opposition qui admettent qu'ils n'ont que quelques points de réserve par rapport au projet de loi tel qu'il est aujourd'hui. Les mobilisations des syndicats se jouent sur d'autres motivations plus générales, mais avec comme but de faire quand même échouer le vote de cette loi, et je trouve cette hypocrisie anti-réforme assez dommage. Mais bon, on changera pas 40 ans de non-dialogue social si facilement, d'un côté comme de l'autre...
Je ne comprends pas le sens de cette phrase... de quelles "motivations plus générales" parles-tu ? Je suis moi-même gréviste depuis plus d'une semaine, et nos revendications sont claires : le financement du système de retraite doit passer par une hausse des taux de cotisation, ou par une hausse des taux de salaire, dont l'augmentation moins rapide que la production de la richesse nationale, depuis 30 ans, au profit d'une augmentation symétrique de la rémunération du capital, est la cause principale du déficit. 10% de la richesse produite, depuis 30 ans (soit 200 milliards d'euros, soit encore 8 fois le déficit du système de retraite) a été transférée de la rémunération du travail (salaires + cotisations) vers la rémunération du capital. Si seulement on revenait sur les diverses exonérations de "charges patronales" (qui ne sont rien d'autres que des "cotisations", appelées "charges" par abus idéologique de langage), une partie du déficit serait largement comblé. Cette réforme, dans la lignée de celle de Seguin (1987, indexation de la pension sur les prix et non sur les salaires, les premiers augmentant moins rapidement que les seconds), Balladur (1993) puis Fillon (2003, après l'échec de la réforme de 1995), les deux dernières entrainant une hausse de la durée de cotisation (dans le privé puis dans le public), vise à faire porter sur le salariat le poids de ce transfert dans la répartition des richesses. Et que l'on ne vienne pas me dire qu'une telle évolution était "nécessaire", dans le cadre d'une économie mondialisée, pour attirer des investisseurs. Nous savons, et les modèles économétriques sur les facteurs de l'investissement le confirment, que le "coût du travail" est un critère marginal dans les décisions d'investissement (à côté de la qualité du système de formation, de la stabilité du régime politique, des coûts de transaction, du marché local d'écoulement de la production, etc.). Quant aux "délocalisations", toutes les projections économétriques montrent qu'elles ne se multiplieraient pas par magie. Sans compter que, outre le désarroi de certains secteurs touchés par le phénomène, elles ne créent pas nécessairement de chômage, à un niveau plus global, réorientant seulement l'économie vers des secteurs plus hautement qualifiés (d'où l'importance de l'adaptation du système de formation).
Je suis de ceux qui estiment qu'une réforme fondée sur la notion de "pénibilité du travail" (qui serait cependant, je le concède, un moindre mal, les propositions du gouvernement, en ce sens, étant totalement risibles) ne changerait pas la donne décrite plus haut : il s'agit d'une contestation fondée sur le "contournement" (et non le "déni") de l'argument démographique.
Enfin, si quelques sceptiques se refusent, à tout prix, à considérer une hausse du "coût du travail", je vous signale la
prochaine parution (je dévoile des secrets interdits à révéler), dans un quotidien d'actualité économique et financière que l'on peut difficilement qualifier de journal gauchiste (vous devriez trouver facilement), d'un article, signé par deux chercheurs en économie, sur la possibilité d'un financement du déficit du système de retraite par le recours à une "taxe carbone". Afin de concilier les objectifs d'une "croissance verte" et d'une préservation des droits sociaux attachés à la condition salariale. Ne manquerait plus que la volonté politique.