Car je l'aime et pas que pour ce match et que quoi qu'il fasse je l'aimerai encore.
Citation
L'immortel
Le soleil des rageux pâlit dès son entrée,
Pour nos coeurs languissants il jette encore
Quelques dribbles tremblants qui combattent l’ennui ;
La haine croit, le doute meurt, tout s'efface et tout fuit !
Qu'un autre devant ce génie maigrisse et s'attendrisse,
Qu'il recule de trois pas en tremblant,
Qu'il ne puisse de loin lire sans frémir
Le chant des fidèles tout prêt de jouir,
Les soupirs du mécréant et du jaloux s’étouffent
Suspendus sur les bords de son canapé miteux,
Ou l'airain gémissant, dont les sons éperdus
Annoncent aux mortels qu'un Dieu est revenu !
Je te salue, ô Javier ! Libérateur céleste,
Tu ne m'apparais point sous cet aspect funeste
Que t'a prêté longtemps les médisants;
Ton pied n'est point armé d’une épée de mousse,
Ton physique n'est point lâche, ton oeil n'est point perfide,
Au secours des passionnés une volonté clémente te guide ;
Tu n'anéantis pas, tu délivres ton jardin,
Céleste messager, porte un flambeau divin ;
Quand mon coeur fatigué s’imagine le match nul,
Tu viens d'un jour plus pur inonder ma paupière ;
Et l'espoir près de toi, rêvant sur ton aile droite,
Appuyé sur la foi, m'ouvre un monde plus beau !
Viens donc, viens détacher mes chaînes corporelles,
Viens, ouvre ma prison; viens, prête-moi tes ailes,
Que tardes-tu? Javier; que je m'élance enfin
Vers cette victoire, mon principe et ma fin !
Qui m'en a détaché ? qui suis-je, et que dois-je être ?
Je revis et ne sais plus ce que c'est que de souffrir.
Toi, qu'en vain j'interroge, esprit, hôte inconnu,
Avant de m'animer-, quel ciel habitais-tu ?
Quel pouvoir t'a jeté sur ce terrain fragile ?
Quelle main t'enferma dans ta prison d'argile ?
Par quels noeuds étonnants, par quels secrets rapports
Le génie tient-il à toi comme tu tiens au mystique ?
Quel jour séparera l'âme de la matière ?
Pour quelle nouvelle équipe quitteras-tu la mienne ?
As-tu tout oublié? Par-delà ce coup de génie,
Vas-tu renaître encore dans un oubli nouveau ?
Vas-tu recommencer une semblable action ?
Dans le sein de Dieu, ta source et ton Paris,
Affranchi pour jamais de tes liens mortels,
Vas-tu jouir enfin de tes droits éternels ?
Oui, tel est mon espoir, ô moitié de ma vie !
C'est par lui que déjà mon espoir raffermie
A pu voir sans effroi sur tes traits enchanteurs
Se faner des demies les brillantes couleurs.
C'est par lui que percé du but qui nous a délivré,
Jeune encore, en mourant vous me verrez sourire,
Et que des pleurs de joie à nos derniers adieux,
A ton dernier regard, brilleront dans mes yeux.
"Surcôté !" s'écriera le troupeau de l’Equipe,
Et celui dont l’aveuglement pervertira la nature,
Dans un coin du cerveau nouvellement décrit,
Voit penser la matière et végéter l'esprit ;
Faut pas s’enflammer! diront-ils, que trop d'orgueil abuse,
Regarde autour de toi : tout commence et tout s'use,
Tout marche vers un terme, et tout naît pour mourir ;
Dans ces prés verdissant tu vois la passe à délivrer ;
Et tu vois dans ces commentaires la jalousie au front superbe
Sous le poids de ton talent tomber, ramper sous l'herbe ;
Dans leurs lits desséchés tu vois la mauvaise foi tarir ;
Les haineux même, les haineux commencent à pâlir ;
Ce Zlatan dont le talent a gâché ta naissance,
Le soleil, comme nous, marche à sa décadence,
Et dans les cieux déserts les mortels éperdus
Te chercheront un jour et ne te verront plus !
Tu vois autour de toi dans la nature entière
Les dribbles à effectuer, cassage de rein sur rein,
Et ce but, d'un seul geste confondant ton orgueil,
De tout ce qu'il produit devenir le cercueil.
Et l'homme, et l'homme seul, ô sublime folie !
Au fond de son forum croit retrouver le génie,
Et dans le tourbillon au néant emporté.
Abattu par le temps, rêve enfin d'éternité !
Qu'un autre vous réponde, ô sages de Culture !
Laissez-moi mon erreur : j'aime, il faut que j'espère ;
Ma faible raison se trouble et se confond.
Oui, la raison se tait : mais l'Instinct vous répond.
Pour moi, quand je verrais dans les célestes plaines,
Javier, s'écartant de sa route certaine,
Dans le champs de Stamford par David Luiz heurté,
Parcourir au hasard les cieux épouvantés ;
Quand j'entendrais gémir et se briser la terre ;
Quand je verrais ton corps errant et solitaire
Flottant loin des soleils, pleurant l'homme détruit,
Se perdre dans les champs de l'éternelle nuit ;
Et quand, dernier témoin de ces scènes funèbres,
Entouré du chaos, de l’élimination, des ténèbres,
Seul je serais debout : seul, malgré mon effroi,
Etre infaillible et bon, j'espérerais en toi,
Et, certain du retour de l'éternelle haine,
Viendront te détruire, mais je t'attendrais encore !
Souvent, tu t'en souviens, dans cet heureux séjour
Où naquit d'un regard notre immortel amour,
Tantôt sur les sommets de ce match au Camp Nou,
Tantôt aux bords déserts du lac d’Annecy,
Sur ton aile, loin du monde du milieu,
Je plongerais avec toi dans ces obscurités.
Les ombres à longs plis descendant des montagnes,
Un moment à nos yeux dérobaient les campagnes
Mais bientôt s'avançant sans éclat et sans bruit
Le choeur mystérieux des astres de la nuit,
Nous rendant les objets voilés à notre vue,
De ses mollets revêtirent l'étendue ;
Telle, en notre Parc par les néons éclairés,
Quand les rayons du soir pâlissent par degrés,
La lampe, répandant sa pieuse lumière,
D'un jour plus recueilli remplit le stade.
Dans ton ivresse alors tu ramenais mes yeux,
Et des cieux à la terre, et de la terre aux cieux ;
Pastore caché, disait-il, mais l’intermittence est ton temple !
L'esprit te voit partout quand notre oeil la contemple ;
De tes perfections, qu'il cherche à concevoir,
Ce forum est le reflet, l'image, le miroir;
Le jour est ton regard, la beauté ton sourire
Partout le Lyonnais t'adore et l'âme te respire ;
Eternel, infini, tout-puissant et tout bon,
Ces vastes attributs n'achèvent pas ton nom ;
Et les rageux, accablés sous ta sublime essence,
Célèbreront ta grandeur jusque dans leur silence.
Et cependant, ô Javier! par ta sublime loi,
Cet esprit abattu haïra encore vers toi,
Et sentant que ton talent est la fin de son être,
Impatient d'aimer, brûle le de te connaître.
Tu jouais : et nos coeurs unissaient leurs fantasmes
Vers cet être inconnu qu'attestaient nos désirs ;
A genoux devant toi, t'aimant dans tes ouvrages,
Et l'aurore et le soir te portaient nos hommages,
Et nos yeux enivrés contemplaient tour à tour
Tes buts notre exil, et tes passes notre séjour.
Ah! si dans ces instants où l'âme fugitive
S'élance et veut retourner sa veste qui la captive,
Toi, Dieu, du haut du ciel répondant à nos voeux,
D’un tir libérateur nous eût frappés tous deux !
Nos âmes, d'un seul bond remontant vers leur source,
Ensemble auraient franchi les mondes dans leur course
A travers l'infini, sur l'aile droite de l'amour,
Elles auraient monté comme un rayon du jour,
Et, jusqu'à toi lui-même arrivant éperdues,
Se seraient dans son sein pour jamais confondues !
Ces voeux nous trompaient-ils? Au néant destinés,
Est-ce pour te voir jouer que les êtres sont nés ?
Partageant le destin du corps qui la recèle,
Dans la nuit du banc de touche l'âme s'engloutit-elle ?
Tombe-t-elle en poussière ? ou, prête à s'envoler,
Comme une passe qui n'est plus va-t-elle être délivrer ?
Après un vain soupir, après l'adieu suprême
De tout ce qui t'aimait, n'est - il plus rien qui t'aime ?
Ah! sur ce grand secret n'interroge que toi !
Vois mourir ce qui te haïssent, Javier, et réponds-leur encore!