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L’imbroglio des écharpes
Il y avait au moins un signe visible du club parisien, hier, dans les tribunes. Sur les 20 000 écharpes distribuées gratuitement aux spectateurs par le club de Quevilly figurait le logo du PSG. La préfecture du Calvados, qui avait interdit dans la zone du stade toute personne se réclamant supporter parisien, a envisagé de les interdire. Ces écharpes avaient coûté 39 400 euros au club amateur. Après des discussions animées, elles ont finalement été distribuées.
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Le PSG n’était pas le bienvenu
Les supporters de Quevilly n’ont pas seulement fait la fête. Ils ont aussi déstabilisé l’adversaire.
MARDI APRÈS-MIDI, en conférence de presse, Antoine Kombouaré avait refusé de considérer que les joueurs de Quevilly étaient des amateurs. L’entraîneur du Paris-SG s’est certainement fait une réflexion assez identique en découvrant le public de Quevilly, qui fut tout sauf champêtre et bon enfant. Il mérite sa place en Ligue 1, en tout cas dans un monde plus professionnel. Les 20 523 spectateurs qui ont rempli les tribunes, dont 4 900 arrivés en car du Petit-Quevilly, ont vraiment hissé leur niveau. Ils ont transformé le stade d’Ornano en une enceinte chaude, presque hostile, d’autant qu’aucun supporter du Paris-SG n’avait été autorisé à y pénétrer. Une enceinte que Paris n’avait pas revue depuis deux ans et une défaite 0-3 en Championnat.
Les fans du club haut-normand ont d’abord fait comme les grands en conspuant l’entrée sur le terrain des gardiens parisiens, les premiers à venir s’échauffer. Puis en entamant ce refrain aussi célèbre que stupide, Paris, Paris, on t’enc… Une chanson rarement interprétée sur les pelouses de Championnat de France amateur. Hier soir, elle fut reprise régulièrement par des chœurs en folie. Les supporters se sont aussi illustrés en lançant plusieurs fois des objets sur la pelouse du stade d’Ornano. En première période, les stadiers de la tribune Borrelli furent même contraints d’intervenir pour calmer quelques excités. La seconde fut bien calme, surtout après l’ouverture du score du PSG (51e). Mais, à la fin du match, profitant du feu d’artifice, la foule n’oublia pas d’offrir une standing ovation aux joueurs de Quevilly, réunis pour un tour d’honneur.
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Erding pile et face
L’HOMME CLÉ
ERDING, PARIS-SG (5). – Si le Paris-SG ne s’était pas qualifié, Erding aurait été montré du doigt. En première période, l’attaquant a beaucoup raté. Presque tout, même les choses les plus simples, à l’image de ce ballon qu’il a envoyé au-dessus du but de Rhoufir alors qu’il se trouvait à deux mètres (34e). Quatre minutes plus tard, l’attaquant parisien a gâché encore un excellent travail de Hoarau. Touché, l’international turc ne s’est pas découragé. Avant de sortir sur blessure, il a offert au PSG son ticket pour la finale.
Les Parisiens n’ont pas fait un grand match mais ils ont été solides, sérieux et rudes, à l’image de SAKHO (7). Le jeune défenseur central a réalisé un match parfait dans l’engagement. Sa relation avec ARMAND (7), de mieux en mieux en cette fin de saison, s’est révélée efficace. Le duo a empêché LAUP (5), le centreur impénitent, d’utiliser son arme favorite. Il a failli égaliser, toutefois, à la 90e. Son coup franc a heurté le poteau d’EDEL (6), auteur d’une parade décisive (42e) sur VEAUGEOIS (6), milieu de terrain précieux, comme COLINET (7). Habituellement avant-centre, il a tenu le choc physiquement face à MAKELELE (6) et CLÉMENT (6). Il a orienté parfaitement le jeu, avec ce souci permanent de l’aérer. Il a joué, en priorité, sur le côté de JALLET (4), le plus en difficulté des Parisiens. Il a beaucoup souffert face à Ouahbi, peu aidé il est vrai par GIULY (5) qui avait moins de jambes hier soir. Sur son aile, il a peiné à faire la différence, souvent contré par PALLOIS (6). Il la fit une fois, de la tête… Sa déviation fut prolongée par Erding (51e, 1-0). La défense centrale de Quevilly, composée par WEIS (5) et BEAUGRARD (5), a écarté de nombreuses situations chaudes mais sa générosité lui a aussi joué quelques mauvais tours, et a offert des espaces aux attaquants parisiens, plutôt maladroits hier soir.
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Paris éteint leur rêve
Avec du réalisme et de la chance, le Paris-SG a éliminé les amateurs de Quevilly, qui ont montré de belles choses.
LA COUPE DE FRANCE n’est pas redevenue folle. Dix ans après Calais, l’unique cas pour un club de niveau 4 en quatre-vingt-treize ans, Quevilly n’atteindra pas la finale de l’épreuve. Le club avait réussi cet exploit en 1927 (face à Marseille, 0-3), un autre temps, celui du foot ouvrier d’avant le professionnalisme. Les amateurs d’aujourd’hui se sont arrêtés en demi-finales, comme leurs glorieux aînés de 1968. Ils ont buté sur l’obstacle parisien, qui n’a jamais impressionné les joueurs du Championnat de France amateur (CFA).
La prestation des Parisiens, sérieux, durs sur l’homme mais au talent en berne, y est pour beaucoup. Le Paris-SG a souvent été prévisible. Il a été aussi maladroit. Pendant un moment, les incroyables ratés d’Erding n’ont pas eu de quoi faire peur. Par trois fois, l’attaquant turc s’est retrouvé en position idéale. Par trois fois, il a manqué de réalisme face à une solide défense normande, battue, jusqu’à hier, à une seule reprise depuis le début de l’épreuve, frappant à côté (31e), ou au-dessus (34e, 38e) alors qu’il était proche du but. Et c’est juste avant de sortir sur blessure que l’ancien Sochalien a marqué, déviant de la tête un centre d’Armand, déjà effleuré par le crâne de Giuly, passeur chanceux (0-1, 51e). De la chance, le PSG en a déjà eue beaucoup au tirage dans cette Coupe de France. Les Parisiens vont atteindre la finale en n’ayant affronté jusqu’à maintenant qu’un seul club professionnel, Auxerre, en quarts (0-0, 6-5 aux tirs au but). Ils seront obligés d’en battre un autre, Monaco, dans un remake de la finale de 1985 (0-1), pour remporter un trophée qui ne sauvera pas tout à fait leur saison, gâchée par leurs prestations en Ligue 1 et surtout par le comportement violent de leurs supporters, interdits de déplacement.
Quevilly trouve le poteau
Les manières des spectateurs normands n’ont pas été, non plus, toujours exemplaires, surtout quand les Parisiens tiraient des corners. Mais l’équipe de CFA, qui voulait jouer à Robert-Diochon, au Petit-Quevilly, théâtre de leurs précédents exploits contre Rennes, en 8es (1-0, 9 février) et Boulogne, en quarts (3-1, 23 mars), a bien fait de venir à Caen, même si le ministère de l’Intérieur ne lui a pas vraiment laissé le choix. Elle y a trouvé une ambiance électrique et assourdissante qui, au fil de la partie, a désinhibé les joueurs amateurs, souvent au même niveau que leur adversaire. Dans l’engagement, comme avec cette semelle de Beaugrard sur Sakho (66e) ou ce coup de coude de Colinet également sur le défenseur parisien, sonné (80e). Dans le vice, aussi, en témoigne cette échauffourée entre Weis et Makelele (45e) alors que le capitaine parisien voulait jouer rapidement un coup franc dangereux et que Beaugrard l’en avait empêché.
Dans le jeu, où ils ont joué la zone en défense et le passage par les ailes en situation offensive, les Quevillais ont respecté les consignes de l’entraîneur, Régis Brouard, autre héros malheureux de cette soirée. De temps en temps, ils ont frappé de loin, à l’instar de Vaugeois, dont le missile tendu a été sorti en corner par Edel (42e), désigné à juste titre par les Normands comme un des maillons faibles de l’équipe professionnelle. Hésitant devant deux coups francs lointains de Laup (74e, 90e), il a été sauvé du second par son poteau gauche, au début des arrêts de jeu. Plus tôt, Quevilly avait eu la chance de donner un autre visage à cette demi-finale. Mais la tête de Weis est passée au-dessus (28e) et Armand s’est interposé devant un tir de Laup (13e). Enfin, surtout, dans une fin de match brûlante, le petit ailier droit a préféré frapper alors que Passape était seul (87e).
Voilà le PSG en finale de la Coupe de France, deux ans après son échec face à Lyon (0-1 après prolongation) et quatre ans après sa victoire contre Marseille (2-1), le dernier de ses sept succès dans l’épreuve. Pour la Fédération et les autorités, qui auront à gérer 80 000 spectateurs au Stade de France le 1er mai prochain, on ne sait pas si c’est une bonne nouvelle. Pour le club, c’est un énorme soulagement au bout d’une saison si compliquée.
VINCENT GARCIA
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Erding en sauveur
Après avoir tout raté ou presque, l’attaquant parisien a sorti le Paris-SG d’un mauvais pas. Une fois de plus.
IL S’EST TENU le haut de la cuisse et a fait un signe discret. Sur son banc, Antoine Kombouaré a tout de suite compris. Deux minutes plus tard, alors qu’on jouait l’heure de jeu, Mevlut Erding quittait le terrain, les adducteurs en feu (il passera des examens aujourd’hui), en recevant une tape amicale de son entraîneur. En se faisant bander sur le banc, l’attaquant parisien ne savait pas encore que son petit coup de tête, à la 51e minute, allait être décisif. Ou peut-être que si. Car la saison en demi-teinte du Paris-SG et la première mi-temps rugueuse face à ces représentants du Championnat de France amateur qui jouaient crânement leur chance n’engageaient pas à un optimisme démesuré.
Il aura donc fallu un coup de tête d’Erding à la réception d’un centre d’Armand dévié au premier poteau par Giuly pour qualifier le PSG en finale de la Coupe de France. « Je ne veux pas la mettre là mais je sais où est le but, admettait-il après coup. Ce n’est pas complètement fait exprès mais elle va au fond, c’est l’essentiel. »
Avant ça, Erding avait à peu près tout raté. Un débordement dangereux étouffé par un tacle rageur de Weis (15e), une frappe à bout portant perdue dans les étoiles (34e), un centre de Giuly transformé en tête plongeante, directement dans les gants du gardien de Quevilly (42e). Et, surtout, surtout, ces combinaisons avortées avec Hoarau. Le longiligne Réunionnais n’eut de cesse de mettre son allié sur orbite. Mais son débordement côté gauche terminait en reprise à côté (31e), son centre en retrait, après avoir effacé deux Quevillais, était botté au-dessus (38e), l’appel du Turc dans le dos de la défense adverse était justement sifflé hors jeu (40e).
Leur association, tellement attendue pendant la première partie de la saison, où Hoarau se morfondait à l’infirmerie, n’a pas eu la réussite escomptée depuis janvier. Mais il y a une forme de logique pourtant à ce que ce soit Erding qui rapproche le PSG d’un trophée aux vertus apaisantes dans le contexte haché d’une saison sportive en demi-teinte, qui plus est pourrie par des affaires extrasportives.
L’ancien joueur de Sochaux est l’un des meilleurs Parisiens de la saison, si ce n’est le meilleur. Incontournable. Aligné 26 fois en Ligue 1, il a signé 13 buts et deux passes décisives. En Coupe de France, il est aussi efficace. Son quatrième but lui ouvre les portes de la finale de la Coupe de France. En 2007, pour celle qu’il avait atteinte avec Sochaux, il était dans les tribunes du Stade de France. Cette fois, il ne voudra manquer ça pour rien au monde.
JOSÉ BARROSO
L'Equipe