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Milan l’attend au tournant
Joueur, dirigeant, entraîneur : Leonardo a grandi en Lombardie, où son image s’est brouillée depuis son départ à Paris.
IL SUFFIT parfois d’un choix de carrière pour faire basculer une réputation. Au fil des années qu’il a passées à Milan, Leonardo s’est construit une image flatteuse, celle d’un homme élégant et cultivé, d’un philanthrope aux valeurs solides. Et puis, le mois dernier, il a choisi de quitter l’Inter pour le PSG version pétrodollars: pour les supporters milanais, le Brésilien n’est plus qu’un impitoyable mercenaire.
La vérité est moins tranchée, mais il était sans doute écrit que la fin serait brutale après quatorze ans d’une histoire riche entre Milan et l’ex-milieu de terrain. Leonardo débarque en Lombardie en 1997, après une saison remarquée au PSG. Si ses débuts à l’AC Milan sont délicats, « Leo » le joueur sera un artisan majeur de la conquête du titre, en 1999 (12 buts en Serie A). Après un bref séjour au Brésil, il revient chez les Rossoneri en octobre 2002 pour finir sa carrière et jeter les bases de sa reconversion, aidé par ses amitiés au club et celle, surtout, d’Adriano Galliani, le président délégué.
L’acte II s’ouvre en 2003 : à son initiative, l’AC Milan lance la Fondazione Milan, une organisation caritative dont il est nommé secrétaire général. Une main sur le coeur, un pied au Milan, voilà Leonardo le dirigeant, qui s’implique aussi dans le recrutement. Bilan ? S’il n’a jamais déniché une pépite ni pris de décisions seul sur un transfert, il se révèle utile quand il s’agit de convaincre un joueur. Comme pour Pato, tout proche de signer au Real Madrid avant une discussion avec le Brésilien, en 2007.
Ses détracteurs lui reprochent de fuir ses responsabilités
Une nouvelle page s’ouvre à l’été 2009 : le club cherche un entraîneur, Leonardo accepte de rendre service. Pour ses débuts dans le métier, il remplira l’objectif : une qualification directe pour la Ligue des champions. Mais il n’échappera pas à tous les écueils, parfois déroutant dans son coaching, et fera naître les premiers doutes à force d’insister sur un schéma risqué avec quatre joueurs offensifs. En C 1, le pari ne passe pas et le Milan est corrigé en huitièmes par Manchester United (2-3, 0-4). Après une année encourageante, Leo l’entraîneur choisit de partir, fatigué des critiques de Silvio Berlusconi, son président, à qui il fut l’un des rares à tenir tête.
« Je ne savais pas ce que c’était qu’entraîner, ç’a été une superbe expérience mais je ne sais pas si je le referai, et sûrement pas dans les années qui viennent », dit-il alors. Six mois plus tard, il estnommé entraîneur de l’Inter. Pour une demi-saison là aussi contrastée : réussie en Championnat, où il a réveillé l’équipe ; ratée en C 1, où l’Inter, tenante du titre, fut punie par Schalke en quarts de finale (2-5, 1-2). La rumeur ne tarde pas à bruisser : Massimo Moratti, le président de l’Inter, chercherait un nouvel entraîneur. Leonardo a-t-il senti le vent tourner et sauté sur l’occasion parisienne ? Ses détracteurs lui reprochent de fuir ses responsabilités alors que se profile une intersaison compliquée pour l’Inter, obligée de vendre. Mais il en trouvera d’autres au PSG, pour une nouvelle expérience qui en dira beaucoup sur ses capacités à gagner.
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Nene titulaire ?
PARIS-SG. – Nene, victime d’un coup à la cheville droite face à Lorient (0-1, samedi), a suivi un programme spécifique de soins jusqu’à mercredi, mais s’est entraîné avec le reste de l’effectif hier. Un point définitif sera fait aujourd’hui, mais il devrait être titularisé. Kombouaré a récupéré ses dix internationaux au compte-gouttes, hier. Les Bleus (Gameiro, Hoarau, Matuidi, Sakho, Ménez) ont pu participer à la séance à huis clos hier matin, mais pas Sirigu (Italie), Bisevac (Serbie), Tiéné (Côte d’Ivoire), Bahebeck (Espoirs) et Ngoyi (RDC), qui ont rejoint leCamp des Loges dans l’après-midi. Armand (suspendu, en phase de reprise), Douchez (reprise), Sissoko (reprise) et Pastore (reprise) sont indisponibles. – A. C.
L’équipe probable : Sirigu – Jallet, Bisevac, Sakho (cap.), Tiéné (ou Ceara) – Ménez, Chantôme, Matuidi, Nene – Bodmer (ou Hoarau), Gameiro.
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Il pense toujours à Ancelotti
ANTOINE KOMBOUARÉ joue-t-il sa tête à Rennes, demain soir ? La question se pose au regard des manoeuvres qui semblent s’opérer dans les coulisses du PSG. Hier, Leonardo a contacté Nasser al-Khelaïfi pour envisager le scénario d’une défaite en Bretagne. Dans cette hypothèse, qui placerait Paris sous une pression déjà énorme, le Brésilien a rappelé au président du conseil de surveillance que Carlo Ancelotti, libre depuis son limogeage de Chelsea, resterait une solution de premier choix pour remplacer le Kanak, comme L’Équipe l’avait révélé le 17 juin. Le message a été transmis à Doha. Les Qatariens s’interrogent depuis le début sur la capacité de Kombouaré à gérer un groupe de joueurs majeurs jusqu’aux sommets de la L 1, voire de l’Europe. Ces doutes ne concernent pas Ancelotti, vainqueur de deux Ligues des champions comme entraîneur (2003, 2007) avec l’AC Milan. En cas d’échec à Rennes, un changement d’entraîneur ne semble donc pas à exclure, même si Leonardo a assuré, hier, que la question ne se posait pas, même en cas de défaite au stade de la Route-deLorient. « Je ne pense pas à ça, je pense au projet que l’on a à long terme. Je ne suis pas inquiet. Le projet, c’est avec Antoine Kombouaré. Il n’y a pas d’autres projets ( avec un autre entraîneur)... Il connaît l’équipe, le club, les joueurs. Il a très bien fait avec beaucoup de difficultés, la saison dernière. » Puis il a ajouté : « Après, c’est le football. Même moi, je ne sais pas combien de temps je vais rester ici. Il sait qu’on doit faire un saut, et pas que sur le plan des victoires, mais aussi des mentalités. Ona besoin de temps et de patience, c’est obligé. La patience, on en a besoin, mais pas trop non plus. On joue pour gagner et on doit assumer. » Le message est clair. – A. C., D. D., J. T.
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Leo tout-puissant
Le directeur sportif brésilien du PSG assure vouloir changer les mentalités au club. Pour l’instant, il décide seul, de tout.
Un mois après son arrivée à Paris, Leonardo, qui a réalisé la campagne de transferts la plus onéreuse de l’histoire de la L1, a tenté d’expliquer, hier, son action. L’homme qui détermine la politique sportive du club décide de tout ou presque : l’organisation dirigeante, les choix de joueurs et la façon de les recruter. Ce qui ne plaît pas toujours à tout le monde, au Qatar.
L’HISTOIRE ne dit pas encore si Leonardo (41 ans) sera celui qui contribuera au retour du PSG en Ligue des champions, ni même si le club de la capitale trônera, à nouveau, sur le Championnat de France. Elle dit, en revanche, que le directeur sportif brésilien est celui qui a investi le plus, en Ligue 1, sur le marché des transferts (81,2 M€), avec une somme record pour celui de l’Argentin Javier Pastore (42 M€). Un mois après son arrivée à Paris, l’ex-entraîneur de l’Inter Milan, qui déclarait hier vouloir « changer les mentalités », a imposé sa méthode et son style.
LEONARDO ET SES « COLLABORATEURS »
Avant d’officialiser son arrivée au PSG, Leonardo a tenu à ce que les nouveaux actionnaires qatariens fassent place nette. Le président Robin Leproux évincé, il pouvait débarquer avec les pleins pouvoirs. « Le président, aujourd’hui, c’est Nasser (Al-Khelaïfi), moi je suis directeur sportif », a rappelé le Brésilien hier. Président du conseil de surveillance en attendant les changements de statuts du club (en septembre), Al-Khelaïfi n’aime guère être exposé et a une connaissance parcellaire du foot européen. Aujourd’hui, la seule figure active du PSG est Leonardo. Il choisit, décide, négocie et, une fois tout réglé, présente les nouveaux joueurs le pouce levé. Bien sûr, il avertit l’entraîneur, Antoine Kombouaré, de l’état d’avancement des dossiers : « Avec Antoine, on se parle presque tous les jours. » Mais ces discussions relèvent davantage de l’information que de la consultation.
Le champion du monde 1994 est arrivé seul à Paris. Contre toute attente, il a maintenu la cellule de recrutement composée d’Alain Roche et Éric Pécout, deux hommes qui ne chercheront pas à détourner les projecteurs. « Je ne suis pas là pour faire la révolution, prévient-il. Il faut changer la manière de faire, mais on peut le faire avec les mêmes hommes. Ce n’est que si on n’y arrive pas avec les mêmes qu’on change les personnes. » Il a donc laissé de côté Jean-Michel Moutier, pourtant contacté début juillet, et tourné le dos à Franck Henouda, l’agent qui avait soufflé son nom à l’entourage du cheikh Tamim ben Hamad al-Thani, prince héritier du Qatar. Il n’a pas non plus accéléré la reconversion de Claude Makelele (38 ans) au sein du club. « On s’est vus samedi avec Claude, pendant le match contre Lorient, explique Leonardo. Avec lui, il n’y a pas besoin de parler, il est déjà dans le club. » Sauf que l’ancien capitaine du PSG n’y occupe aucune fonction officielle, au point que son entourage pense que « Leo » voit en lui un concurrent potentiel.
LEONARDO ET LE RECRUTEMENT
Les réseaux de Leonardo sont surtout concentrés en Italie et au Brésil. « Mais au Brésil, ça devient de plus en plus difficile d’acheter des joueurs car les clubs ont les moyens de les garder » , explique-t-il. Alors, c’est de l’autre côté des Alpes qu’il est allé faire son marché : Pastore, Ménez, Sirigu, Sissoko. Il justifie :« En Angleterre et en Espagne, les clubs sont plus riches et les salaires plus élevés. » En privilégiant ses contacts italiens et sa relation avec Jean-Pierre Bernès, l’agent de Ménez et de Matuidi, Leonardo a cristallisé quelques rancoeurs au Qatar, où des proches du cheikh avaient impulsé certains dossiers, comme ceux du Marocain Adel Taarabt (Queens Park Rangers) ou du défenseur brésilien Luisao (Benfica), deux joueurs que le nouveau directeur sportif ne souhaitait pas recruter.
À Doha, la garde rapprochée du prince goûte peu de ne pas être consultée, et le fait savoir. Au point que l’avenir à moyen terme de Leo semble parfois s’écrire en pointillé, lui dont les atermoiements avaient déjà froissé les Qatariens dans la dernière ligne droite des négociations menant à son arrivée. Seulement, en lui confiant les clés du PSG et une liberté d’action totale, le cheikh ne peut pas lui demander des comptes à chaque transfert. Et puis l’arrivée de Pastore, un talent sud américain qu’il apprécie, aurait conforté le prince dans l’idée que Leonardo, même contesté en coulisses, pouvait oeuvrer efficacement. Comment a-t-il convaincu l’argentin de Palerme, courtisé également par des clubs russes ? Avant de répondre, le patron parisien sourit, réfléchit puis lance : « C’est le projet de faire quelque chose de spécial. » À côté de cette perspective, le salaire proposé (4,5 M€ brut par an) apparaît presque accessoire…
LEONARDO ET LES JOUEURS
Arrivé à Paris le 13 juillet, Leonardo a rencontré l’effectif professionnel dans la foulée. S’il se rend régulièrement au Camp des Loges, le centre d’entraînement de Saint-Germain-en-Laye, il n’y va pas non plus quotidiennement. « La dernière fois qu’il est venu, il a passé son temps au téléphone », glisse un joueur. Le directeur sportif veut maintenir une certaine distance, même s’il n’hésite pas à appeler les joueurs lorsqu’ils sont blessés, pour prendre des nouvelles. S’il ne discute pas des compositions d’équipe avec Kombouaré, il n’a pas hésité non plus à dire ce qu’il pensait de la prestation d’ensemble, après la défaite face à Lorient (0-1, samedi). « J’étais encore entraîneur la saison dernière, je ne peux pas sortir complètement de ce que je suis. »
ALEXANDRE CHAMORET, DAMIEN DEGORRE et JEROME TOUBOUL
L'Equipe