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Ils sont si loin de Paris
Le quotidien des amateurs de Locminé a peu à voir avec celui du PSG. Mais ici aussi des histoires et des personnages valent le détour.
HABITUÉ À VIVOTER entre la Division d’honneur et le CFA 2, niveau auquel il occupe actuellement la huitième place de son groupe, Locminé n’a jamais rencontré d’équipe de Ligue 1 en cent trois ans d’existence. Pour un baptême, le petit village de 4300 habitants ne pouvait voir plus grand que ce Paris-SG qui est son exact opposé. La Saint-Colomban, club de patronage aux 235 000 de budget, ne compte aucun contrat fédéral et s’appuie sur un fonctionnement profondément amateur. Il s’incarne à travers l’histoire de trois hommes qui s’apprêtent à vivre un rêve.
(article sur le président manquant)
Didier Noblet, l'entraineur revanchard
SOUS LA PRÉSIDENCE DE LAUDIC, Locminé n’avait jamais éliminé une équipe de niveau supérieur. La qualification contre Vannes (National, 2-1 après prolongation, le 10 décembre 2011) au 8e tour reste donc un moment particulier et encore plus pour Didier Noblet (43 ans). Né à Vannes, le technicien y a joué en Division 3 avant d’évoluer à Locminé durant huit ans (CFA 2, Division d’honneur) et d’être entraîneur-joueur à Questembert (Division Supérieure Élite). Il s’occupe ensuite de la réserve de Vannes et rejoint l’équipe première en 2007 comme adjoint de Stéphane Le Mignan, son ancien coéquipier à Locminé. Vannes monte en Ligue 2, les portes du professionnalisme s’ouvrent. Elles vont brutalement se refermer.
« En National, je bénéficiais d’un aménagement d’horaires de mon employeur (il est, depuis vingt ans, agent informatique dans une mutuelle). Le coach n’a pas tenu compte des efforts que j’ai pu faire, soupire-t-il. C’est une blessure. On m’a reproché une seule chose : ne pas connaître la L2. Être laissé sur le bord de la route, ça fait mal, surtout que j’avais d’excellentes relations avec les joueurs. » Il en retrouve certains à Locminé, qui lui tend aussitôt la main.
Après la montée, acquise en mai 2011, il doit stabiliser le club en CFA 2. Il rajeunit l’effectif (vingt-trois ans de moyenne d’âge), dirige quatre séances par semaine mais ne rêve plus d’élite. Aujourd’hui, c’est le rêve qui s’invitera chez lui. Il sera le premier technicien français à serrer la main de Carlo Ancelotti, entraîneur du Paris-SG.
Yoann Le Roux, défenseur-instituteur
CE N’EST PAS VRAIMENT au programme mais Yoann Le Roux a bien été obligé d’expliquer à ses élèves de CE2-CM1 le principe de la Coupe de France. Certains avaient du mal à croire que leur maître allait jouer contre le Paris-SG. « Ils ne se rendent pas trop compte de ce qu’il se passe, raconte-t-il. C’est un peu bizarre mais je leur ai dit qu’ils pouvaient regarder le match à la télévision. » À vingt-sept ans et après six saisons au club, le défenseur central, instituteur à Guer (à 60 km de Locminé), fait figure d’ancien, au côté du gardien et doyen Erwann Flegeo (35 ans). Son parcours est semblable à celui d’une dizaine de ses coéquipiers. « J’ai été formé à Vannes, explique-t-il, je n’ai pas réussi à atteindre l’équipe première et j’ai tenté ma chance ici. » Désormais, il joue pour le plaisir et manque un entraînement par semaine à cause de l’école. « Dans l’équipe, il y a des joueurs plus jeunes qui peuvent encore y croire, analyse-t-il. Quand on vieillit, c’est différent. Après le travail, on va à l’entraînement pour retrouver les copains, vivre de bons moments ensemble. » Cette philosophie ne l’empêche pas d’aborder le match contre Paris avec ambition : « Il y a une chance, on va essayer de rivaliser. On va défendre le mieux possible pour éviter qu’il y ait trop de buts. » S’il n’a pas particulièrement étudié les attaquants parisiens, il confesse que cette semaine la motivation à l’entraînement était plus forte que d’ordinaire : Le Roux a très envie de continuer à parler de la Coupe à ses élèves.
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«Si c’est pour prendre une dérouillée… »
Le milieu de Locminé, ne veut pas se contenter de « faire de la figuration ». Avec ses partenaires, il croit l’exploit possible.
LOCMINÉ: Flégeo (cap.) – Moustapha, Plunian, Le Guennec, Y. Le Roux, Adjamossi – Péru, Le Boursicaud, Randuineau, Gargam ou Clavel – A. Maïga. Remplaçants : J. Le Roux (g.), Jacopin, Clavel ou Gargam, Jacques, Auger, Le Sauce, Kerangouarec. Entraîneur : D. Noblet.
PARIS-SG: Sirigu– Bisevac ou Ceara, Lugano, Sakho (cap.), Armand– Jallet, Bodmer, Moh. Sissoko – Pastore, Nene – Hoarau ou Erding. Remplaçants : Douchez (g.), Ceara ou Bisevac, Z. Camara, Landre, Erding ou Hoarau, Kebano ou Balde, Bahebeck. Entraîneur : C. Ancelotti.
SI LES LOCMINOIS affichent la mine de ceux qui ont gagné au Loto, c’est parce qu’ils savent ce qu’ils doivent au tirage. « Cette année, le PSG est l’équipe à rencontrer, reconnaît le milieu Maxime Randuineau. Si l’équipe en face avait été une CFA, je ne pense pas qu’on aurait été les stars du week-end… » Le président Hervé Laudic s’était rendu avec sept personnes du club au tirage des trente-deuxièmes, à Amiens. «À l’aller, dans le minibus, on supputait… Les sept autres voulaient le Paris-SG, il n’y a que moi qui préférais Rennes, se souvient-il. On est tombés sur le gros lot, On a sauté de joie... »
Depuis ce 12 décembre, le défenseur Yoann Le Roux a traversé plusieurs phases : « Les deux jours qui ont suivi le tirage, c’était l’effervescence. L’excitation est tombée pendant la trêve et, depuis la reprise, ça monte chaque jour pour arriver à l’apothéose du match. »
Il aura lieu à Lorient, à cinquante kilomètres de Locminé, parce que le vétuste stade du Pigeon-Blanc n’est pas homologué. Il se déroulera donc sur synthétique, et les Bretons s’y sont préparés en allant s’entraîner trois fois sur la pelouse du Moustoir, dont les tribunes seront garnies par 15 000 spectateurs. Venu chercher des places jeudi, au siège du club, un Locminois apostrophait le président : « Bonne chance, hein ! Moi, je suis anti-PSG… »
La richesse du club parisien ne participe pas vraiment à sa popularité en Bretagne, et Hervé Laudic s'en est apercu: « Tout le monde me parle d’argent. Je suis obligé de dire que ces sommes sont indécentes, mais je préfère que les Qatariens investissent en France plutôt qu’à l’étranger. »
À Locminé, le seul lien avec le Qatar s’appelle Abou Maïga. L’attaquant béninois a joué là-bas, à Al-Mesaimeer, en Deuxième Division. Avec Randuineau, qui y a joué quinze minutes avec Vannes en 2008-2009, Anicet Adjamossi est le seul à avoir connu la L2 française. Si l’expérience est maigre, les Bretons ne gâchent pas la fête avec des complexes. « On ne veut pas faire de la figuration, avance Randuineau. Il y a beaucoup de bruit autour de l’affiche, si c’est pour prendre une dérouillée derrière, ça ne vaut pas le coup… » « Ça reste un match, poursuit Le Roux. Et je sais que je vais pouvoir m’appuyer sur mes coéquipiers. » L’entraîneur Didier Noblet a en effet mis l’accent sur une solidarité sans faille : « Il faudra être solides, car on va surtout jouer sans ballon. » Ses joueurs pensent quand même à la victoire. Le président n’avait pas pensé à évoquer la question des primes, mais ils lui ont rappelé qu’un succès était possible, et qu’il faudrait alors le récompenser… – A. Cl.
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Ancelotti presque francophone
Après une semaine à la tête du Paris-SG, l’Italien s’exprime le plus souvent en français. En public comme dans le vestiaire.
S’IL S’AGIT d’un « coup de com », il est plutôt réussi. Hier, pour sa première conférence de presse à Paris, l’entraîneur italien Carlo Ancelotti (52 ans) a tenu à s’exprimer en français, une langue qu’il ne maîtrisait pas à son arrivée au PSG, pendant la trêve, et qu’il espère parler couramment d’ici à la fin de la saison. Il a bien eu quelques hésitations dans le choix de ses mots, usé du tu plutôt que du vous et parfois eu recours à l’anglais ou à l’italien, mais il a compris presque toutes les questions et, quand ce n’était pas le cas, il reprenait son interlocuteur avec le sourire : « Je demande, au début, de parler doucement et toi, tu parles très vite ! » L’auditoire était sous le charme.
Mais c’est surtout son vestiaire qu’Ancelotti doit séduire, dominer, apprivoiser et motiver. La séduction a commencé dès l’arrivée en stage à Doha, en début de semaine. « J’ai chanté une chanson, raconte-t-il. J’aime chanter. Je suis un bon chanteur. Mais je ne vous dirai pas le titre, même sous la torture. »
À ses joueurs : « Je ne veux pas vous entendre rigoler ou plaisanter »
La domination, ce fut pour les premières séances d’entraînement. Après avoir observé le comportement de ses joueurs, il les a réunis et prévenus : « Sur le terrain, on travaille, on ne parle pas. Je veux que vous soyez concentrés, même pendant les étirements. Je ne veux pas vous entendre rigoler ou plaisanter. »
Tout ça sans élever la voix. La première impression des joueurs fut positive. « L’état d’esprit a changé pendant les entraînements, explique l’un d’entre eux. On sent que tout le monde est impliqué. » Ancelotti ne se leurre pas : « C’est comme la rentrée des classes. Au début, tout le monde est concentré. Mais je veux que ça dure jusqu’à la fin de la saison. »
Et l’homme aux quatre Ligues des champions (deux comme joueur, deux comme entraîneur) tient à montrer que lui aussi doit faire des efforts. Sa première causerie, à Doha, fut prononcée en italien et traduite par Giovanni Mauri, le préparateur physique francophone. Mais depuis, Ancelotti commence ses discours en français, même s’il les termine, le plus souvent, dans sa langue natale. Et c’est en général Claude Makelele, son adjoint, qui endosse le rôle d’interprète.
Le successeur d’Antoine Kombouaré cherche à être compris de tout le monde, le plus vite possible et sans trop d’assistance. « Quand il s’adresse à nous pendant une séance, il essaie de le faire en français, ou alors utilise des mots italiens qui sont compréhensibles ou encore utilise le tableau pour que ce soit clair », témoigne un joueur. Ancelotti, qui s’est installé au Camp des Loges dans le bureau jusque-là dévolu aux présidents, semble susciter l’adhésion de son groupe. Comme s’il voulait imprimer une image positive dès son arrivée à Paris, lui qui a été apprécié dans la plupart de ses clubs précédents. À L’AC Milan (2001-2009), par exemple, quasiment personne ne l’a oublié. À la fin du match amical AC Milan - PSG (1-0), mercredi, l’entraîneur a à peine eu le temps de débriefer la rencontre avec son nouveau groupe. Plusieurs Milanais sont venus le voir dans le vestiaire pour lui tomber dans les bras et discuter. En italien.
DAMIEN DEGORRE
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Vers une charnière Sakho-Lugano
La première équipe du PSG dirigée par Carlo Ancelotti en match officiel devrait ressembler à celle qui a été alignée contre l’AC Milan (0-1), mercredi, en amical. Dans un dispositif en 4-3-2-1, c’est Hoarau qui évoluait en pointe, hier, lors de la mise en place, avant de céder sa place à Erding. Les cinq milieux de terrain n’ont pas changé : Nene et Pastore derrière l’avant-centre, Jallet, Bodmer et Sissoko à la récupération. La défense, en revanche, pourrait subir quelques changements par rapport à celle qui a joué à Dubaï. Hier, elle était composée de Bisevac à droite, Armand à gauche, et Lugano et Sakho en charnière. L’international serbe a ensuite laissé sa place à Ceara alors que Camara a remplacé Sakho. Gameiro (genou), Ménez ( cuisse), Matuidi (adducteurs) et Chantôme (cuisse) sont indisponibles. – D. D.
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CLEMENT « COMME MAKELELE ». – Carlo Ancelotti a officialisé, hier, l’arrivée dans son staff de l’anglais Paul Clement, qui fut son adjoint la saison dernière à Chelsea. « J’ai une bonne relation avec lui, il fera un bon travail ici, a déclaré l’entraîneur du PSG. Il commencera la semaine prochaine et sera, comme Claude Makelele, mon assistant.»
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Maradona « allume » Leonardo
DANS UN ENTRETIEN diffusé ce soir dans l’émission Canal Football Club, sur Canal +, Diego Maradona s’en prend de façon assez virulente à Leonardo, le directeur sportif brésilien du PSG. L’ancien meneur de jeu de Naples (1984-1991) déclare notamment : « Je ne comprends pas très bien Leonardo. Je ne l’ai pas compris quand il est passé de L’AC Milan à l’Inter Milan, et je comprends encore moins ce qu’il fabrique aujourd’hui avec le PSG. » Voilà pour le sentiment général. Maradona pousse ensuite la critique jusqu’à lancer : « Je me demande s’il est joueur, entraîneur, agent ou marchand de pétrole. Je ne comprends pas. » Et l’actuel entraîneur du club d’Al-Wasl, à Dubaï, d’assurer : « C’est la preuve que dans le football quand vous savez faire du lobbying, aujourd’hui, ça paye. »