Nenê-Rai : le Brésil qui fait rêver ParisLe Figaro a réuni la nouvelle star et la légende du Paris-SG.
Rendez-vous dans une brasserie huppée de Saint-Germain-en-Laye. Rai, le joueur du siècle du Paris-SG, et Nenê, le meilleur parisien depuis le début de saison, se retrouvent pour déjeuner. Deux artistes brésiliens originaires de la région de Sao Paulo. «Rai était la star là-bas et c'était mon idole. Je me souviens d'un coup franc extraordinaire contre Barcelone en finale du Mondial des clubs (1992)», lâche Nenê admiratif. Si Rai a ensuite marqué à jamais l'histoire du PSG (titre de champion de France, victoire en Coupe des Coupes), Nenê, auteur d'un excellent début de saison, commence à rédiger sa légende parisienne. Sous le numéro 10 porté par son illustre aîné. «Un honneur.» Leur rencontre est à l'image de leur jeu. Souriante et efficace. LE FIGARO. - Rai, avez-vous été surpris par l'adaptation rapide de Nenê au PSG ?RAI. - Non, car je connaissais ses qualités. Mais j'ai quand même été étonné de voir à quel point il est devenu très vite un joueur décisif. (S'adressant à Nenê.) Toi, tu sais jouer avec la pression. C'est ce qui manquait au PSG. Des joueurs qui tiennent le groupe.
NENÊ. - S'adapter si rapidement, produire son meilleur, c'est énorme. Marcos Ceara a joué un rôle fondamental dans mon adaptation. Il m'a dit comment se déroulent les choses ici. Moi, la pression ne me fait pas peur. Le joueur brésilien ne la craint pas généralement. J'ai l'impression que je suis à Paris depuis longtemps.
RAI. - Pour ma part, la première saison à Paris avait été difficile. Je découvrais l'Europe. Toi, tu connaissais déjà les championnats européens. Moi, je venais directement de Sao Paulo où on avait tout gagné en trois ans. J'avais eu deux ans et demi sans vacances. J'étais fatigué. Les gens s'attendaient à voir le meilleur joueur du monde, mais je n'étais pas dans les meilleures conditions. L'adaptation en dehors du terrain n'avait pas été simple non plus.
Quel regard portez-vous sur le PSG de cette saison ?RAI. - Je vois un vrai changement avec un bon état d'esprit. L'entraîneur a le groupe sous contrôle et l'équipe se lâche plus. Auparavant, dans les moments difficiles le niveau baissait. Mais ce n'est plus le cas. Le plus important, c'est de ne pas laisser passer l'opportunité de revenir en Ligue des champions. On connaît l'impact financier que génère cette épreuve. Cela fait trop longtemps que Paris n'y a pas participé.
NENÊ. - Je suis d'accord. Le plus important, c'est de revenir en C1. C'est la compétition référence que je rêve de jouer.
Vous possédez des styles très différents. Auriez-vous été complémentaires ?RAI. - On a eu l'opportunité de jouer ensemble au Brésil fin décembre lors d'un match bénévole. Je t'ai donné une passe décisive. À mon âge, c'est déjà bien (rires). Moi je fais la passe, toi tu cours, dribbles et fait le reste. C'est vrai que l'on a des styles différents qui auraient pu être complémentaires. Je suis droitier et toi gaucher. En tout cas, c'était un premier essai réussi.
NENÊ. - Rai, c'est toujours la classe sur un terrain. C'était un plaisir et un privilège énorme de jouer avec toi.
Rai, vous étiez l'idole du Parc des Princes. Est-il encore possible de nouer une relation aussi forte avec les supporteurs ?RAI. - C'est plus rare, car les enjeux financiers ont pris beaucoup de place et c'est difficile de garder un grand joueur si tu n'as pas une grande équipe. J'ai passé huit ans à Sao Paulo et cinq au PSG. Ça valait le coup. Je n'oublierai jamais le jour où j'ai dit adieu aux supporteurs parisiens.
NENÊ. - Cinq ans dans un même club, c'est énorme car notre carrière est courte. Je suis heureux ici et je ne pense pas à partir ailleurs, surtout si on arrive à disputer la Ligue des champions. C'est important pour moi, car je n'ai pas vraiment d'histoire avec un club. Je ne suis resté qu'un an ou deux dans ceux où je suis passé. J'ai envie d'avoir un lien fort avec un club. J'espère que ce sera ici.
Rai, comment le PSG est perçu aujourd'hui au Brésil ?RAI. - Tout le monde sait que Paris n'a pas de bons résultats depuis longtemps. Mais il y a une tradition. Avec Ronaldinho, on a beaucoup parlé de ce club. S'il revient en Ligue des champions, je suis sûr qu'il vendra plus de maillots que Lyon ou Marseille. Lyon est populaire chez nous grâce au passage de Juninho, mais Paris c'est Paris !
NENÊ. - Il y a une tradition brésilienne à Paris, j'espère la perpétuer et porter le club le plus haut possible.
RAI. - À Paris, les supporteurs adorent les joueurs brésiliens. Et cette ville fait rêver les Brésiliens. Pour les attirer, il suffit d'une ou deux bonnes saisons du club.
Avant le récent France-Brésil, un jury de spécialistes réunis par «Le Figaro» vous avait élu meilleur joueur brésilien ayant évolué dans le championnat...RAI. - J'étais dans le métro parisien. Et un supporteur de l'autre côté de la rame a crié comme un fou : «Rai, tu as été élu meilleur joueur brésilien !» Tout le monde m'a regardé. J'ai dit «merci» mais j'étais un peu gêné (rires). Je suis fier, car parmi les votants il y avait des gens de qualité qui connaissent le foot.
NENÊ. - C'est bien mérité. Je ne dis pas ça parce que tu es là ! (Rires.) J'aurais voté pour toi, car tu es le plus complet. Tu as tout gagné. Ronaldinho a fait des choses magnifiques ici, mais il n'a pas remporté de titres.
Pourquoi les Brésiliens réussissent-ils en France ?
RAI. - En général, ils sont mûrs dans leur tête. Ils ont le culte de la victoire bien ancré en eux. Nos joueurs font rêver, mais ils savent aussi défendre. C'est pour ça qu'on a gagné cinq Coupes du monde.
Nenê, avez-vous digéré votre non-sélection contre la France ?NENÊ. - J'ai vu le match à la maison (sourires). Il y avait une attente autour de ma sélection. J'ai été un peu déçu. C'est comme ça. Je vais continuer à travailler pour le PSG, c'est le plus important.
RAI. - Quand on voit le match, on se dit que si tu avais été sur le terrain, cela aurait pu faire la différence. Il y a de la place pour toi. Mais un Brésilien champion dans une équipe espagnole ou italienne sera toujours plus exposé au Brésil qu'un Brésilien sacré en France. Tant que le PSG ne sera pas en Ligue des champions, cela sera compliqué pour toi.
Qu'est-ce vous aimez sur un terrain avant tout ?NENÊ. - Le but !
RAI. - Rien de plus fort que l'émotion qu'engendre un but. Mais j'adorais le petit pont (rires). Voir la réaction du public et la non-réaction du défenseur.
NENÊ. - Si je dis que j'aime provoquer les défenseurs, cela va faire encore polémique. Toi, tu as arrêté donc tu peux parler librement, mais moi je préfère ne rien dire (rires). En fait, j'adore le contact du ballon. S'il ne vient pas à moi, je suis fâché. Le futsal m'a beaucoup aidé pour être à l'aise dans les petits espaces. Mais ce n'est pas le même sport.
RAI. - Oui, d'ailleurs le meilleur joueur du monde de futsal, un Brésilien, a essayé de jouer sur un grand terrain et il n'a jamais réussi. Pourtant, il est plus fort techniquement que Ronaldinho.
Vous êtes des passionnés de tennis. À quand la partie ?NENÊ. - Pourquoi pas !
RAI. - Je pense que je serai meilleur face à lui au tennis qu'au futsal. Là, je ne prends pas le risque (rires en commun).
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