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Un Carlier dans la chaussure
Invité ce soir du « Grand Journal » de Canal + (19 h 5), Raymond Domenech, agacé par le chroniqueur Guy Carlier, décline toute invitation de « Stade 2 ». Ce qui pose problème aux journalistes.
RAYMOND DOMENECH a de l’humour. C’est entendu, pas le même que Guy Carlier qui, dimanche dernier (*), a consacré sa chronique hebdomadaire – grinçante toujours, drôle parfois– au sélectionneur des Bleus, accusé
de choisir ses médias pour des raisons autant commerciales que politiques. « Raymond Domenech refuse
de se rendre à Stade 2 car il ne cautionne pas le travail de Guy Carlier », commente, laconique, le service de
presse de l’équipe de France. « Il dit ne pas vouloir venir à cause de Carlier mais on ne l’a jamais beaucoup vu chez nous avant », persifle Daniel Bilalian, le directeur des sports de France Télévisions.
La dernière présence du sélectionneur sur le plateau de Stade 2 remonte à avril 2006, suivi d’un duplex de Clairefontaine en septembre 2006 puis d’un entretien enregistré avant l’Euro 2008 avec Dominique Le Glou. En poste à Stade 2 depuis la rentrée, Carlier avait déjà sévi sur France 2Foot l’an passé. Et la causticité de ses chroniques, même si elle ne le visait pas, n’avait pas échappé à Domenech. Il n’est pas le premier à décliner l’ invitation du service public en raison des saillies de Carlier. Déjà, l’an dernier, Frédéric Antonetti avait refoulé une équipe de tournage de feu France 2 Foot du terrain d’entraînement de Nice.
Anigo n’est pas fan
José Anigo, le directeur sportif de l’OM, n’est pas plus fan, ni Jérôme Rothen ou Bernard Mendy… Ce qui n’est pas sans poser problème aux journalistes du service public amenés à se rendre sur le terrain. « C’est un peu pénalisant, admet Fabien Lévêque, commentateur no 1 sur le football.
Mais on ne fait pas le même métier, Raymond Domenech ne doit pas faire l’amalgame. » La rédaction des sports de France Télévisions porte un regard très dubitatif sur les diatribes de l’auteur de Y a pas que les grands qui rêvent, tube mémorable chanté par Mélody dans les années 1980. « La direction a clairement imposé Carlier. Il ne fait pas l’unanimité, révèle Antoine Chuzeville, vice-président de la Société des journalistes. C’est une question de culture : lui, il vient du divertissement ; nous, on fait du reportage. »
« Mais je ne suis pas journaliste, je suis chroniqueur, un auteur, s’agace l’intéressé. C’est quoi ces conneries ! Je m’en fous que Domenech ne vienne pas, si c’est pour débiter trois lieux communs. » Accusé par certains journalistes d’être fort avec les faibles et faible avec les forts, de « se payer » des sportifs absents du plateau (« c’est ce qui me gêne le plus », pointe Chuzeville), le chroniqueur, insidieusement, a mis le doigt dimanche sur la propension de la télévision à servir la soupe aux sportifs. Il visait peut-être TF 1 et Canal +, il pensait (un peu) à Stade 2. Sa présence n’est pas neutre et correspond à une réorientation de l’émission vers un ton plus perfide, saignant. « On nous l’a présenté ainsi : Carlier doit être le poil à gratter, confirme Chuzeville. Nous préférerions retrouver ce ton dans les enquêtes ou les reportages. C’est un peu de notre faute, on n’en propose peut-être pas assez mais, en même temps, on n’est jamais accueilli à bras ouverts. »
Bilalian, à l’origine de la venue de Carlier, le défend mordicus et vise, plus que ses journalistes, la frilosité du milieu sportif, peu enclin à la critique : « Les sportifs ne veulent qu’on leur pose que des questions auxquelles ils peuvent répondre : “Je prends les matches les uns après les autres.” Comme si on pouvait les jouer tous en même temps. » Carlier, en résumé, serait la caution critique de Stade 2. C’est ce qu’il avait déjà laissé sourdre lors des Jeux de Pékin, quand il condamna l’interview façon Michel Drucker de Lionel Horter par Gérard Holtz. Qui, déjà, n’avait pas aimé. Un de plus
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