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Comme tu as changé, cher Parc des Princes
C’était le 5 mai 2007. Mon premier match au Parc, à l’occasion d’un PSG/OL. 6 ans et demi et 5 visites plus tard, j’ai pu mesurer davantage l’évolution de ce stade mythique et de son équipe résidente, lors du match PSG/Nice du 9 novembre dernier. Souvenirs et reportage d’un simple spectateur de Ligue 1.
1679277C‘était le 5 mai 2007, 35ème journée de Ligue 1. Alors que cette saison est à quelques encablures de son verdict final, le Paris Saint-Germain se trouve une nouvelle fois dans une position délicate. Le club occupe une piteuse 15ème place au classement et n’est pas encore sauvé mathématiquement. Nous sommes alors en plein milieu du “black-out” qu’a connu le club de la capitale pendant quelques saisons durant les années 2000. Le Parc a souvent grondé les siens cette saison là, mais ce soir il est archi-comble pour ce match à 17 heures. L’adversaire lyonnais est quant à lui au sommet de son art, leader incontesté et déjà assuré du titre de champion. Qu’importe, malgré les vérités du classement, ce match reste un choc du championnat, et les spectateurs ne s’y trompent pas.
Passionné assidu de la Ligue 1 et habitué à “visiter” les différents stades, je suis ce jour-là dans un état d’excitation que seuls les lieux mythiques me réservent à leurs approches. J’ai toujours voulu connaître le Parc des Princes, à l’architecture si particulière, et à l’ambiance souvent ventée. Et j’ai enfin l’occasion d’aller voir le PSG chez lui dans un grand match.
Le boulevard périphérique commence à être encombré alors que nous sommes encore à 3 bonnes heures du coup d’envoi. Mon véhicule sort du tunnel juste avant la porte Saint-Cloud, et le Parc apparaît par la grandeur de ses fameuses arches. Premiers frissons, cette fois-ci, nous y sommes ! Après avoir bataillé quelques minutes pour trouver une place, je m’approche des abords du stade, et j’en profite pour étudier de moi même cette “enveloppe” énorme en béton et ces grandes arches lui donnant un relief et un volume imposant imaginés par Tallibert. Il y a déjà beaucoup de monde autour, et un nombre assez improbable de CRS et de policiers à cheval. Bien plus qu’autour de tous les stades qu’il m’ait été donné de voir auparavant. Je me dis alors que la réputation du Parc et de ses virages n’est peut-être pas usurpée.
Sur les abords de la voie qui mène à l’enceinte parisienne, des hommes tentent de récupérer des places à la sauvette, d’autres “bossent” en vous proposant des hot-dogs saucisse ou merguez grillées sur place.
Alors que j’arrive à hauteur du virage Auteuil, la foule attend déjà en masse l’ouverture des grilles. Les couleurs de Paris sont partout, et une collection de maillots s’offre à moi. Je vois alors les maillots les plus contemporains, tous ou presque sont floqués en l’honneur du buteur maison, la légende portugaise du PSG, le Prince du Parc de l’époque, Pedro Miguel Pauleta. Mais je reconnais nombre de maillots plus anciens, aux saveur du foot à papa des années 80/90. Du bon vieux maillot Hechter RTL de Susic, au maillot Tourtel du milieu des années 90 floqués Ricardo, jusqu’aux maillots de la glorieuse époque, souvent au nom du Brésilien Raï. Ca sent bon le vieux public de passionnés, collectionnant ces maillots comme des garants de leurs souvenirs, des témoins de leur histoire de supporters.
Les portes s’ouvrent, les agents de sécurité aux entrées sont au travail, la police est sur ses gardes. Je me faufile, impatient d’entrer dans cette gigantesque cocotte-minute. Je monte les quelques marches jusqu’à ma porte, tribune Paris, et découvre enfin le Parc de l’intérieur. Beaucoup m’ont dit qu’il était particulier et que j’allais avoir un avis tranché sur son esthétique. On aime ou on déteste. Moi, j’adore. Malgré un béton brut omniprésent, je me sens impressionné par ces deux anneaux rouge et bleu et par la pente de la tribune supérieure. J’avoue qu’il me semble plus petit que l’idée que je m’en faisais, sans doute agrandie par le prisme de la télévision.
Le temps passe et le stade se remplit à grande vitesse. Les nombreux groupes de supporters installent banderoles et drapeaux. A ma droite le virage Auteuil, à ma gauche les virage Boulogne et son KOB (Kop Of Boulogne) qui terrorise autant les visiteurs que le préfet de police de Paris. Au moment de l’entrée à l’échauffement des équipes, le stade est rempli aux deux tiers. Les Lyonnais sont copieusement sifflés et insultés, les Parisiens ovationnés comme s’ils restaient sur 10 titres de champion. Je commence à enfin entendre la clameur du Parc et les premiers chants. Je sens déjà que je ne vais pas être déçu… Composition des deux équipes. Bizarrement, le public parisien pense que les joueurs adverses partagent tous le même nom de famille, à savoir “en*****”. Même si c’est de mauvais goût, je dois avouer que ça m’a fait sourire… puis vient la composition des locaux, où chaque nom est repris par les 44 000 parisiens ayant garni le stade à ras-bord. Celui qui évidement rapporte tous les suffrages à l’applaudimètre n’est autre que ce diable de Pauleta. Entendre son nom crié de cette façon à chaque match à la maison, ça doit être quelque chose… entrée des équipes sur fond de“Who said I Would” de Phil Collins, tifo monumental aux couleurs du club sur tout le stade, magnifique.
Le match, enfin. Je me délecte des chants des deux kops et de leur prestation gestuelle. Ce stade possède une acoustique incroyable, les chants résonnent comme si on avait un casque sur la tête. Le plus monumental de tous reste le “Paris est magique” où les deux virages se répondent. Presque personne ne regarde le match durant ce chant, tous les regards sont fixés vers les Kops. Le match est équilibré, et un peu à la surprise générale Paris domine et ouvre le score par Edouard Cissé. Dans une ambiance de dingue où il semble parfois difficile de pouvoir communiquer avec son voisin, les Parisiens pensent tenir une victoire méritée face à des Lyonnais timorés. C’était sans compter sur leur star brésilienne Juninho, qui égalise sur un contre assassin au bout du temps additionnel. 1/1 score final, Lyon est heureux, Paris valeureux. Malgré quelques sifflets de dépit, les Parisiens quittent leur jardin sur une ovation du public, qui ne quitte presque pas le stade avant que tous les leurs n’aient franchi le tunnel qui mène aux vestiaires.
Je sors du stade conquis, par le match d’une part, et par l’ambiance à la hauteur des promesses que j’avais en elle. Indéniablement le stade que je préférais en France jusqu’alors.
9 Novembre 2013, 6 ans et demi plus tard, donc. Je retourne au Parc pour enfin venir voir le PSG nouveau. Le Paris champagne et surtout champion en titre, celui de Zlatan et Cavani. Comme lors de ma première visite, je me sens impatient à l’idée de pouvoir admirer ces stars internationales, même si pour deux des places les moins chères du stade, mon portefeuille s’est allégé de 110 euros.
J’arrive aux abords du stade deux bonnes heures avant le coup d’envoi. A ma grande surprise, et cela même s’il pleut des cordes, il y a très peu de monde dans les rues jouxtant le Parc. Il n’y a aucune odeur de merguez, juste des kiosques, antenne de la boutique du club, distribuant les maillots et écharpes officiels. Des enfants attendent déjà au bord du tapis rouge derrière la tribune Borelli où les étoiles parisiennes feront leur entrée dans l’enceinte. Je constate également avec étonnement le sens du détail apporté par les nouveaux propriétaires du club. Rien n’est oublié pour rappeler son standing. Pour preuve : la moindre barrière métallique de sécurité derrière la tribune Borelli est habillée par une toile aux couleurs du club, avec son nouveau logo. Plus design, plus moderne, avec la mise en avant du “PARIS” et la mise en retrait du “Saint-Germain”.
Plus tard, alors que la foule commence à arriver, je ne retrouve pas la même diversité dans les maillots portés par les supporters. Il y en a bien quelques-uns arborant des reliques de l’ancien Paris, tout de même, mais une immense majorité porte les maillots “nouvelle ère”, avec un flocage préférentiel, celui de la star suédoise Zlatan Ibrahimovic. Je vois également pas mal de “Beckham”, qui en 6 mois à l’air d’avoir pris une place importante dans leur cœur, et dans leur investissement donc.
A l’ouverture des grilles, des bornes pour les tickets m’attendent pour me délivrer, un peu comme dans le métro, un reçu me permettant d’entrer dans le stade. Une jeune “placeuse” accueille les spectateurs pour leur indiquer leur siège. Une fois à ma place, je peux lever les yeux et admirer l’enceinte, qui me semble toujours aussi belle. Le béton est beaucoup moins présent cependant, il semblerait que les nouveaux patrons aient eu le souci “d’habiller” davantage le stade des couleurs du club. Ainsi on peut voir une “jupe” monumentale tout le long de la toiture, avec écrit “Paris Saint-Germain” et “Rêvons plus grand”, la nouvelle devise du club de la capitale. Encore plus “hype”, les panneaux publicitaires à LED sur le long du balcon de la tribune Paris qui me fait face, support de luxe pour les partenaires du club qui voient leurs enseignes surexposées aux yeux des spectateurs et surtout des téléspectateurs.
On approche du lever de rideau, les équipes entrent à l’échauffement dans un stade à peine rempli au cinquième. Nice est sifflé, Paris applaudi. Le stade se remplit doucement et vient l’heure de la composition des équipes. Les Niçois semblent cette fois avoir un nom de famille audible, et le Parc, rempli cette fois-ci aux deux tiers, reprend en chœur le nom des Parisiens qui s’affichent en même temps sur l’écran géant. Je suis étonné du nombre de sièges vides qu’il reste à 2 minutes de l’entrée des joueurs sur la pelouse, alors qu’à mon sens le spectacle a déjà commencé. Une chose n’a pas changé : c’est toujours Phil Collins qui accompagne l’entrée des équipes sur le terrain. Le tifo est en revanche cette fois-ci raté, organisé dans le cadre de la journée du respect. Le stade sera enfin plein, comme promis. Mais après une dizaine de minutes de jeu. Les embouteillages sans doute…
Côté match, par contre, je suis ébloui par la qualité de jeu des Parisiens. Je peux enfin mesurer le chemin qui sépare un bon joueur de Ligue 1 des stars mondiales. Gestes techniques de classe, force collective palpable des tribunes, Paris a changé de galaxie. Zlatan marche tout le match, mais ses rares courses font mouche. Pastore garde le nez en l’air même pendant ses courses avec le ballon, les latéraux distribuent des friandises de centres, les défenseurs centraux sont d’un sang froid glacial. Et que dire de cette ligne offensive suedo-uruguayenne…magique. Oui, comme le dit la chanson, Paris est magique, mais sur le terrain seulement.
En tribunes, je suis sidéré par les comportements et par l’ambiance générale. Lors des deux buts refusés pour hors-jeu logiques, je regarde avec effroi mes voisins de rangée penser qu’il y a but 15 secondes encore après l’action, là où tout bon amateur de foot a pour reflexe immédiat de regarder si l’arbitre assistant a levé son drapeau ou non. Et que dire de l’atmosphère qui règne dans le stade pendant le match…vj’admire les quelques dizaines de courageux qui tentent en vain de lancer les chants de l’ancienne époque, de faire vivre un temps soit peu cette enceinte. Sans doute les survivants de l’ère passée, ultras sympathisants mais non encartés dans les anciens groupes dissous. Mais le vide qui les entoure l’emporte malgré eux. Même le “cri du Parc”, la clameur sur les buts parisiens, prend moins aux tripes qu’auparavant. Le match se termine sous les yeux des spectateurs qui sont restés jusqu’au coup de sifflet final, au contraire des plusieurs centaines de personnes parties éviter les embouteillages dès la 80ème minute. Paris zlatanne Nice 3 à 1 sans forcer, triplé du Viking.
Je sors une nouvelle fois conquis, mais par cette équipe de star qui je le crois, a les capacités pour aller chercher la plus prestigieuse des coupes d’Europe. Mais je reste choqué par ce vide sidéral en terme d’ambiance. La cocotte minute qu’était le Parc des Princes est devenue une cathédrale. Un pèlerinage certes à la mode, mais dépassionné.
Sur le chemin du retour, je me suis remémoré ces souvenirs partagés ici, avec une réflexion folle. Imaginez cette équipe de rêve évoluer dans le stade bouillant qu’était le Parc autrefois. Un alliage impossible aujourd’hui pour les raisons que l’on sait tous. Mais quel dommage de se priver d’un spectacle enfin aussi impressionnant sur le terrain qu’en tribunes à cause d’environ 200 imbéciles qui par le passé ont souillé l’image du public parisien…
Jérémie SOUFFLET
http://seize50.com/2013/12/29/comme-tu-as-...rc-des-princes/