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Pourquoi Samir Nasri apparaît dans le dossier de la « sextape »
Au départ de l’affaire du chantage à la « sextape » visant Mathieu Valbuena, deux hommes : Mustapha Zouaoui, surnommé « Sata », et Axel Angot. Tous deux Marseillais, ils prospèrent dans l’ombre des footballeurs de l’OM. Ils rendent de menus services, se rendent indispensables, au point d’entrer dans l’intimité des joueurs. Mathieu Valbuena a longtemps joué à l’Olympique de Marseille, de même que Djibril Cissé et Samir Nasri. Ils sont ou ont été tous les trois internationaux, même si Nasri est en disgrâce auprès du sélectionneur Didier Deschamps, et Djibril Cissé tout frais retraité.
Comment Nasri fait-il son apparition dans le dossier de chantage envers Valbuena ? Tout simplement à travers des interceptions téléphoniques, dont le contenu a été confirmé par certains témoignages recueillis par la police judiciaire. Placé en garde à vue le 13 octobre 2015, Axel Angot, celui que les enquêteurs suspectent d’avoir récupéré la fameuse « sextape » dans le téléphone portable de Valbuena, dit ceci aux policiers, à propos de sa rencontre avec Mustapha Zouaoui : « J’ai un doute sur l’origine de ma rencontre avec Sata, je ne sais plus si c’était chez Djibril Cissé ou chez Samir Nasri. »
Les trois hommes se connaissent donc. Depuis au moins 2006. Or, les policiers disposent d’une écoute dans laquelle les deux hommes, Zouaoui et Angot, se demandent par l’intermédiaire de qui ils pourraient faire pression sur Valbuena pour qu’il lâche de l’argent en échange de la vidéo supposément en leur possession.
« Si Karim ne veut pas le faire, moi je le fais pour vous »
Le 16 septembre, à 19 h 54, la police intercepte une conversation au cours de laquelle Zouaoui indique à Angot qu’un certain « Samir » a proposé ses services. « Si Karim ne veut pas le faire, moi je le fais pour vous », aurait assuré ce Samir. Zouaoui alias Sata semble peu enthousiaste : « Samir, c’est pas trop bon, confie-t-il à Angot, t’as vu, par rapport à l’autre ? » « L’autre », c’est Valbuena, en froid avec Nasri depuis leur période marseillaise (2006-2008). Angot confirme : « C’est clair. » Sata insiste : « Ils s’aiment pas tous les deux, et j’ai peur que l’autre il se dise c’est le fils de pute qui veut me niquer. (…) C’est beaucoup plus facile pour un mec qui s’assoit et qui discute avec lui, que de l’appeler. » Angot : « Je m’en fous du moment que ça paye. » Et son acolyte d’ajouter : « Samir, il a dit : “Moi, je l’appelle dès ce soir, si vous voulez”… »
Si les patronymes de Samir Nasri et de Karim Benzema ne sont jamais prononcés, les policiers se doutent qu’il s’agit bien des deux footballeurs. « De quel Karim et de quel Samir parle Sata ? », demandent-ils un mois plus tard à Angot, en garde à vue, qui leur confirme qu’« il parle de Samir Nasri et de Karim Benzema ». Finalement, c’est Benzema qui acceptera de jouer les intermédiaires, ce qui lui vaut, depuis le 5 novembre, d’être poursuivi pour « complicité de tentative de chantage ». Samir Nasri, qui ne semble donc pas être intervenu, a déclaré au Monde : « Tout le monde dans le football avait entendu parler de cette histoire de “sextape”. Moi, je n’ai pas voulu m’en mêler, je gagne très bien ma vie, je joue au football, je ne veux pas profiter du malheur des gens. Quant à Sata et Angot, je les connais, je ne leur parle plus depuis longtemps. »
Fabrice Lhomme
Journaliste au Monde